médicament | Child A | Child B | Child C |
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Alogliptine | Sécuritaire | Sécuritaire | Absence de données |
Linagliptine | Sécuritaire | Sécuritaire | Sécuritaire |
Saxagliptine | Sécuritaire | Sécuritaire | Sécuritaire |
Sitagliptine | Sécuritaire | Sécuritaire | Absence de données |
La cirrhose peut altérer le métabolisme du glucose au niveau hépatique en diminuant la néoglucogénèse et en réduisant les réserves de glycogène. La dysfonction devient de plus en plus importante avec la progression de la cirrhose. Lorsque les patients présentent certains facteurs de risque prédisposant à l’hypoglycémie, tel que l’alcoolisme ou la dénutrition, il devient nécessaire de faire preuve de prudence lors de l’initiation d’hypoglycémiants oraux. Étant donné le mécanisme d’action des inhibiteurs de la DPP4, leur risque de causer une hypoglycémie est faible et rend cette classe médicamenteuse intéressante chez les cirrhotiques. (Majeed 2017, Elkrief 2016)
Absorption |
Biodisponibilité : ~100% Insuffisance hépatiqueL’exposition totale à l’alogliptine était diminuée d’environ 10% et l’exposition maximale était diminuée d’environ 8% chez les patients en insuffisance hépatique modérée (Child-Pugh Grade B) comparativement aux sujets sains. L'ampleur de ces réductions n'a pas été considérée comme cliniquement significative. (Monographie)
Dose unique de 25 mg : |
Distribution |
Liaison protéique : 20% Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique minimal (substrat mineur 3A4 et 2D6). Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Élimination : Demi-vie : 21,1 ± 8,8 h Insuffisance hépatique
Child-Pugh B : |
Recommandations de la monographie |
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Il n’est pas nécessaire d’ajuster la posologie chez les patients présentant une insuffisance hépatique légère à modérée (scores 5 à 9 sur l’échelle de Child-Pugh). L’alogliptine n’a pas fait l’objet d’études chez les patients atteints d’insuffisance hépatique grave (score > 9 sur l’échelle de Child-Pugh) et son utilisation n’est donc pas recommandée chez ces patients. |
L’alogliptine est métabolisé en 2 métabolites, dont un qui est actif. L’exposition plasmatique au métabolite actif (relativement à la molécule mère), n’est pas cliniquement significatif. Le métabolisme hépatique ne représente qu’une très faible proportion de l’élimination de l’alogliptine, qui est principalement éliminé par voie rénale. (Scheen 2014)
Selon une étude de Karim et collaborateurs, 8 sujets avec cirrhose hépatique de classe Child B (score Child-Pugh 7 à 9) et 8 sujets sains ont reçu une dose unique d’alogliptine 25 mg par la bouche. Il n’y a eu aucune différence cliniquement significative entre les 2 groupes quant à l’exposition (Cmax ↓ 27%, Tmax ↑ 33% et ASC0-∞ ↓ 22%) et à l’élimination (Tmax ↑ 13%) de l’alogliptine. Par contre, il est à noter que ces données sont seulement rapportées sous forme de résumé (Scheen 2014, Karim 2007)
L’utilisation de l’alogliptine semble sécuritaire encirrhose légère à modérée (Child-Pugh A et B). Par contre, étant donné l’absence de données chez les patients atteints de cirrhose sévère, il est recommandé d’utiliser une molécule alternative dans ce cas. Aucune étude sur son utilisation à long terme chez cette population n’a été retrouvée dans la littérature.
Absorption | Dose unique de 5 mg : Insuffisance hépatiqueChez les patients avec insuffisance hépatique légère ou modérée (selon la classification Child-Pugh), l’ASC et le Cmax moyen de linagliptine étaient similaires à ceux observés chez les patients en santé suite à l’administration de doses répétées de 5 mg. (Monographie) Il existe des données de phase I qui démontrent aucune effet cliniquement significatif de l’insuffisance hépatique sévère sur la pharmacocinétique de la linagliptine suivant l’administration d’une dose unique de 5 mg, par contre, il y a une manque d’expérience clinique.
Child-Pugh A :
Doses répétées de 5 mg (après 7 jours) :
Child-Pugh B :
Doses répétées de 5 mg (après 7 jours) :
Child-Pugh C : |
Distribution |
Fraction liée : concentration-dépendante VD = 1110 L Insuffisance hépatiqueLiaison protéique n’est pas affecté chez les personnes en insuffisance hépatique |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique minimal (substrat modéré 3A4 et P-gp) Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Élimination : Demi-vie : 12 h Insuffisance hépatique
Child-Pugh A :
Child-Pugh B : |
Recommandations de la monographie |
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Il n’est pas nécessaire de modifier la dose en présence d’une insuffisance hépatique légère ou modérée. L’utilisation de la linagliptine en présence d’insuffisance hépatique grave n'est pas recommandée. |
Contrairement aux autres inhibiteurs de la DPP-4 qui sont principalement éliminés par la voie rénale, la linagliptine passe plutôt par la voie biliaire. Étant donné ses caractéristiques pharmacocinétiques, il est important de caractériser la pharmacocinétique de la linagliptine chez les patients cirrhotiques. (Scheen 2014)
Dans une étude de Graefe-Mody et collaborateurs, 25 sujets cirrhotiques (8 de classe Child-Pugh A, 9 de classe B et 8 de classe C) et 8 patients sains ont reçu de la linagliptine 5 mg par la bouche une fois par jour pendant 7 jours. Plusieurs paramètres pharmacocinétiques ont été mesurés après la prise d’une dose unique de linagliptine 5 mg (pour tous les patients cirrhotiques à l’étude), ainsi qu’après la prise de linagliptine 5 mg une fois par jour durant 1 semaine (patients avec cirrhose Child A et B seulement). Après l’administration d’une dose unique de linagliptine, les patients cirrhotiques (toute classe confondue) ont démontré des ASC, Cmax et Tmax soit plus faibles ou égaux à ceux mesurés chez les sujets sains. La même tendance était observée chez les patients cirrhotiques de classe A et B suite à l’administration de doses répétées de linagliptine. Par contre, la demi-vie était légèrement supérieure chez les sujets cirrhotiques. (Graefe-Mody 2012)
Il a déjà été signalé que l’activité de la glycoprotéine P peut être augmentée en insuffisance hépatique. Ceci a pu limiter l’absorption intestinale de la linagliptine et augmenter son élimination biliaire, contribuant ainsi à l’exposition plus faible chez les patients cirrhotiques. De plus, les paramètres pharmacocinétiques mesurés chez les sujets sains dans cette étude se trouvent aux limites supérieures de la normale. Ceci a pu influencer les résultats en sous-estimant l’effet relatif de la cirrhose. (Graefe-Mody 2012)
Tous les effets indésirables observés chez les patients cirrhotiques à l’étude étaient d’intensité faible à modérée (souvent de nature gastro-intestinale). Une prolongation de l’intervalle QTc a été observé chez un patient de classe Child C, mais les auteurs ont jugé que ceci était plutôt causé par la cirrhose. (Graefe-Mody 2012)
Absorption |
Saxagliptine (dose unique de 5 mg) :
5-hydroxy saxagliptine : Insuffisance hépatiqueChez les patients cirrhotiques (Child-Pugh A, B, et C), le Cmax et ASC moyens de la saxagliptine étaient augmentés de 8% et 77% respectivement, comparé aux sujets sains suite à l’administration d’une dose unique de 10 mg. Le Cmax et ASC du métabolite actif étaient diminués de 59% et 33% respectivement, comparé aux sujets sains. Dose unique de saxagliptine 10 mg :
Child A :
Child B :
Child C : |
Distribution | Fraction liée : négligeable Insuffisance hépatiqueAucune influence de la cirrhose sur la liaison protéique |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique (substrat 3A4, 3A5 et P-gp) Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Élimination : Demi-vie : 2,5 h (saxagliptine), 3,1 h (5-hydroxy-saxagliptine) Insuffisance hépatique
5-hydroxy-saxagliptine (dose unique de saxagliptine 10 mg) : |
Recommandations de la monographie |
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Il existe peu de données cliniques sur l’emploi de la saxagliptine en doses multiples en présence d’insuffisance hépatique. L’emploi de la saxagliptine est déconseillé en présence d’insuffisance hépatique modérée ou grave. |
Contrairement aux autres inhibiteurs de la DPP-4, la saxagliptine est métabolisée au niveau hépatique en métabolite actif (5-hydroxy-saxagliptine) possédant environ 50 % de la puissance de la molécule mère. Ces 2 molécules sont principalement éliminées par voie rénale. (Scheen 2014)
Dans une étude de Boulton et collaborateurs, 18 sujets cirrhotiques (6 dans chaque classe de sévérité Child-Pugh) et 18 sujets sains ont reçu une dose unique de 10 mg saxagliptine par la bouche. Comparativement aux sujets sains, les ASC0-∞ chez les sujets atteints d'insuffisance hépatique légère (classe Child-Pugh A), modérée (classe Child-Pugh B) et grave (classe Child-Pugh C) étaient élevées respectivement de 10%, 38% et 77%. Les valeurs d'ASC0-∞ de la 5-hydroxy-saxagliptine étaient inférieures à celles des sujets sains de 22% (Child-Pugh A), 7% (Child-Pugh B) et 33% (Child-Pugh C). Dans l’étude, 2 effets indésirables ont été rapportés (1 épisode de diarrhée et 1 de myalgie) et liés à la prise de saxagliptine dans cette étude. (Boulton 2011)
Étant donné que l’exposition à la saxagliptine est augmenté < 2 fois (toute classe confondue) et que cette augmentation est compensé par une diminution de l’exposition à son métabolite actif (5-hydroxy saxagliptine), la saxagliptine semble être sécuritaire chez les patients cirrhotiques. Aucune étude sur son utilisation à long terme chez cette population n’a été retrouvée dans la littérature.
Absorption | Biodisponibilité : ~87% Insuffisance hépatiqueChez les patients avec insuffisance hépatique modérée (score Child-Pugh 7 à 9), l’ASC et le Cmax moyens de la sitagliptine sont augmenté d’environ 21% (90% CI: 1%, 46%) et 13% (90% CI: −9%, 42%) respectivement comparé aux sujets sains suite à l’administration d’une dose unique de 100 mg.
Child B (Score Child-Pugh 7 à 9) : |
Distribution |
Fraction liée : 38% Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Métabolisme | Métabolisme hépatique minimal (substrat mineur 2C8 et 3A4, substrat modéré P-gp et OAT3) Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Élimination : Demi-vie : 12,4 h Insuffisance hépatique
Child B : |
Recommandations de la monographie |
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L’expérience clinique est limitée chez les patients présentant une insuffisance hépatique modérée et il n’y a pas d’expérience clinique relative à l’utilisation de la sitagliptine chez des patients présentant une insuffisance hépatique grave. La sitagliptine n’est pas recommandé chez les patients présentant une insuffisance hépatique grave. |
La sitagliptine est principalement éliminée inchangée par voie rénale (~79%). L’influence de la cirrhose sur la pharmacocinétique de cette molécule est donc probablement minimale. (Scheen 2014)
Dans l’étude de Migoya et collaborateurs, 10 patients avec une insuffisance hépatique modérée (classe Child-Pugh B, score 7 à 9) et 10 patients sains ont reçu une dose unique de sitagliptine 100 mg par la bouche. Comparativement aux sujets sains, les valeurs d'ASC étaient 21% plus élevées chez les patients cirrhotiques (11.5 ± 4.9 µmol x hr/mL vs. 9.5 ± 2.2 µmol x hr/mL; p = 0,089), tandis que le Cmax était 13% plus élevés chez ces patients 1186 ± 682 nmol/mL vs. 1046 ± 286 nmol/L; p = 0,341). Ces différences n’étaient pas statistiquement significatives. De plus, aucune différence significative n’a été démontré pour les valeurs de demi-vie ou de Tmax. Parmi les patients de cirrhotiques, un seul a subi un effet indésirable (céphalées), qui s’est résolu sans traitement. Aucun patient cirrhotique n’a nécessité l’arrêt du médicament. (Migoya 2009)
À la lumière de ces données, l’utilisation de la sitagliptine semble sécuritaire en insuffisance hépatique légère à modérée (Child-Pugh A et B). Par contre, étant donné l’absence de données chez les patients atteints de cirrhose sévère, il est recommandé d’utiliser une molécule alternative dans ce cas. Aucune étude sur son utilisation à long terme chez cette population n’a été retrouvée dans la littérature.