Hypnotiques en Z

Tableau résumé

médicament Child A Child B Child C
Zolpidem Non recommandé Non recommandé Non recommandé
Zopiclone Utiliser avec précaution, initier à faible dose et titrer lentement Utiliser avec précaution, initier à faible dose et titrer lentement Absence de données
  • Zolpidem (Sublinox®):
    • Intervalle thérapeutique habituel : 5 à 10 mg per os 1 fois par jour au coucher.
    • Formulations disponibles au Canada : comprimés sublinguaux à absorption rapide de 5 et 10 mg.
  • Zopiclone (Imovane®):
    • Intervalle thérapeutique habituel : 3,75 à 7,5 mg per os 1 fois par jour au coucher.
    • Formulations disponibles au Canada : comprimés à libération immédiate de 3,75 ; 5 et 7,5 mg.

    Pharmacodynamie

    Les patients cirrhotiques présentent fréquemment des troubles du sommeil, même en absence de signes manifestes d’encéphalopathie hépatique (EH), qui nuisent considérablement à la qualité de vie. Bien que l’insomnie puisse être associée à différents facteurs non liés de manière pathophysiologique à la maladie en tant que telle (ex. hygiène du sommeil inappropriée, utilisation des médicaments interférant avec le sommeil, fatigue...), les difficultés du sommeil représentent dans une certaine mesure une conséquence directe du dysfonctionnement hépatique. Parmi les troubles du sommeil les plus souvent documentés chez les patients souffrant d’insuffisance hépatique, on retrouve entre autres : la difficulté à s’endormir, le sommeil fragmenté, le raccourcissement de la durée de sommeil, la mauvaise qualité du sommeil, les événements inhabituels associés au sommeil (ex. ronflement intense, apnée ou mouvements périodiques des membres) et la somnolence excessive.

    Par ailleurs, l’EH peut aggraver la somnolence diurne et perturber l'architecture du sommeil. (Formentin 2018) Il est à noter également que les hypnotiques (y compris ceux de type Z) utilisés pour gérer les troubles de sommeil peuvent altérer l’état d’éveil/d’attention chez les patients cirrhotiques et prédisposer/aggraver d’autres problèmes, comme l’EH. (Moore 2016)

    Étant donné que la gestion appropriée des troubles du sommeil peut améliorer considérablement la qualité de vie des patients souffrant de cirrhose, la reconnaissance de cette problématique chez ce type de patients et sa prise en charge adéquate s’avèrent donc cruciales. Dans l’évaluation des troubles du sommeil en présence de cirrhose, les comorbidités du patient doivent être considérées, surtout lorsqu’un traitement pharmacologique est envisagé. De même, l'utilisation des hypnotiques (y compris le zopiclone et le zolpidem) chez l’insuffisant hépatique doit être entrepris en considérant les risques et les bénéfices escomptés associé à leur usage. Il faudrait idéalement éviter l’usage de ces molécules chez les patients avec antécédent d’EH.

    Médicaments

    Zolpidem

    Absorption

    Comprimés sublinguaux à absorption rapide (Langtry 1990) :
    F : ~70%
    Tmax (h) : ~1,4 (~1,8 h en mangeant)

    Dose unique de 5 mg per os (Salva 1995, Holm 2000)
    Tmax (h) : 1,6
    Cmax (ng/mL) : ~59
    ASC0–12 (ng·hr/mL) : 259,75
    ASC0–∞ (ng·hr/mL) : 281,56

    Dose unique de 20 mg per os (Bianchetti 1988)
    Tmax (h) : 0,7
    Cmax (ng/mL) : 250 (femmes/hommes : ↑ de ~45%)
    ASC (ng·hr/mL) : 788 (femmes/hommes : ↑ de ~45%)
    ASC0–12 (ng·hr/mL) : 1004,17
    ASC0–∞ (ng·hr/mL) : 1100,43

    Insuffisance hépatique

    Dose unique de 20 mg per os (Bianchetti 1988)
    Score Child-Pugh non précisé
    Tmax (h) : 0,7
    Cmax (ng/mL) : 499
    ASC (ng·hr/mL) : 4203

    Distribution

    Comprimés sublinguaux à absorption rapide (Langtry 1990)
    VD (L/kg) : 0,54 à 0,68
    Liaison protéique (%) : 92,5 ± 0,1
    fu (%) : 8,1

    Insuffisance hépatique

    Comprimés sublinguaux à absorption rapide (Langtry 1990)
    Score Child-Pugh non précisé
    fu (%) : ~11

    Métabolisme

    Comprimés sublinguaux à absorption rapide (Langtry 1990)
    Métabolisme hépatique extensif.
    Voies métaboliques :
    Majeur : CYP3A4 (~60%)
    Mineurs : CYP2C9 (~22%), CYP1A2 (~14%), CYP2D6 (~3%) et CYP2C19 (~3%).
    Métabolites actifs : non

    Insuffisance hépatique

    Absence de données

    Élimination

    Comprimés sublinguaux à absorption rapide (Langtry 1990)
    t1/2 (h) : ~3 (1,4 - 6,7) 1,5 à 2,4
    CL plasmatique (hommes) (mL/min/kg) : 4
    CL plasmatique (femmes) (mL/min/kg) : 2,7
    % de la dose excrétée dans l’urine (forme inchangée) : < 1
    % de la dose excrétée dans l’urine (métabolites) : 48 à 67
    % de la dose excrétée dans les fèces (métabolites) : 29 à 42

    Dose unique de 20 mg per os (Bianchetti 1988)
    t 1/2 (h) : 2,2

    Insuffisance hépatique

    Dose unique de 20 mg per os (Bianchetti 1988)
    Score Child-Pugh non précisé
    t1/2 (h) : 9,9

    Recommandations de la monographie
    Une étude menée chez des sujets atteints d’insuffisance hépatique traités par le tartrate de zolpidem a révélé une élimination prolongée dans ce groupe; par conséquent, la dose recommandée de zolpidem chez les patients atteints d’insuffisance hépatique est de 5 mg une fois par jour, immédiatement avant le coucher. De plus, ces patients doivent faire l’objet d’une étroite surveillance. Le zolpidem est contre-indiqué chez les patients atteints d’une insuffisance hépatique grave.

    Dans le résumé de Bianchetti et collaborateurs, une dose unique de tartrate de zolpidem 20 mg par voie orale a été administrée à 8 patients souffrant de cirrhose et à 8 volontaires sains afin d’évaluer si les propriétés pharmacocinétiques du médicament étaient influencées par la cirrhose. Le score Child-Pugh des patients souffrant d’insuffisance hépatique n’était pas précisé. Les valeurs moyennes de Cmax et d’ASC du médicament étaient significativement augmentées d’environ 2 et 5 fois chez les sujets présentant une insuffisance hépatique par rapport aux sujets sains (Cmax : 499 contre 250 ng/mL ; ASC : 4203 contre 788 ng·hr/mL respectivement). Les résultats rapportés pour la Tmax étaient similaires (Tmax : 0,7 h). (Bianchetti 1988) De plus, la demi-vie d’élimination moyenne était considérablement prolongée chez les patients cirrhotiques comparativement aux participants en bonne santé (t 1/2 : 9,9 contre 2,2 h) Cependant, l'apparition de la somnolence et la durée d'action étaient comparables entre les groupes à l’étude. Les effets indésirables n’étaient pas rapportés. (Bianchetti 1988)

    Dans une étude randomisée contrôlée à double insu, Sharma et collaborateurs ont évalué l’efficacité [amélioration de la durée totale du sommeil, modification d'autres paramètres polysomnographiques, amélioration du score PSQI (indice de qualité du sommeil de Pittsburgh)] et l’innocuité [précipitation de l’EH ou survenu de tous les types d’effets indésirables] du zolpidem chez 52 patients cirrhotiques présentant des troubles du sommeil (score PSQI > 5). Les patients âgés de 18 à 70 ans et présentant une insuffisance hépatique légère ou modérée ont été randomisés (rapport 1:1) pour recevoir soit du zolpidem 5 mg par jour par voie orale au coucher (n = 26), soit un placebo (n = 26), pendant 4 semaines. Les hommes et les femmes ont reçu la même dose de 5 mg de zolpidem et aucune titration de la dose n’a été effectuée durant la durée de l’essai. (Sharma 2019) Les sujets présentant au moins l’une des caractéristiques suivantes ont été exclus de l’étude : cirrhose Child-Pugh C ; cirrhose aiguë décompensée ; consommation active d’alcool ou dans un délai d’un mois après le début du traitement ; prise de substances illicites dans le dernier mois ; antécédents de désordres psychiatriques et neurologiques ; patients recevant des antidépresseurs, des anticonvulsivants et/ou d’autres hypnotiques ; grossesse ou allaitement ; carcinome hépatocellulaire ; antécédents d'EH ou encéphalopathie active ; risque élevé d'apnée obstructive du sommeil. Les causes de cirrhose documentées étaient : l’alcool (~44%), la stéatose hépatique non alcoolique (~48%) et virales (~8%). Les groupes à l’étude étaient bien équilibrés pour toutes les caractéristiques de base étudiées [âge, sexe, étiologie de la cirrhose, créatinine, bilirubine sérique, ratio normalisé international (RNI), classe de Child-Pugh, score MELD, concentration artérielle d’ammoniac]. De plus, l’analyse de sous-groupe n’a montré aucune hétérogénéité au départ parmi les deux groupes des patients en ce qui concerne les mesures de l'EH minimale (fréquence de scintillement critique), la qualité du sommeil (score PSQI), la somnolence diurne [score ESS (échelle de somnolence d'Epworth)] et les résultats polysomnographiques (temps total de sommeil, efficacité du sommeil, temps de latence du sommeil, nombre d'éveils et de mouvements périodiques des membres par heure de sommeil, architecture du sommeil, indices d’apnée-hypopnée). (Sharma 2019) Dans le groupe des patients traités par zolpidem, l’âge moyen était de 53,7 ans ; 84,6% étaient de sexe masculin ; la bilirubine sérique, le RNI et la concentration artérielle d’ammoniac étaient de 3,4 g/L, de 1,64 et de 94,9 µg/dL respectivement ; le score MELD moyen était de 14,5 ; 46,2% (n = 12) et 53,8% (n = 14) souffraient de cirrhose Child A et B respectivement. Le traitement de 4 semaines a été complété par 24 patients recevant le placebo (2 ont refusé de poursuivre l'étude) et par 23 patients recevant zolpidem (3 ont arrêté le traitement en raison d'une somnolence diurne excessive). (Sharma 2019) Dans le groupe de patients sous zolpidem, après 4 semaines de traitement, le temps médian total de sommeil et l’efficacité du sommeil avaient augmenté significativement de 124,8 min (de 245,5 min à 370,3 min) et de 10,5% (de 68,4% à 78,9%) respectivement. En revanche, dans le groupe de patients traités par placebo, il y avait plutôt une diminution de ces paramètres d’efficacité par rapport au départ (temps médian total de sommeil : de 251,8 min à 200,4 min ; efficacité du sommeil : de 69,8% à 68,9%). De même, il y avait une amélioration considérable d’autres paramètres polysomnographiques d'initiation et de maintien du sommeil dans le groupe sous zolpidem, après 4 semaines de traitement, soit : une diminution du temps de latence du sommeil (de 65,3 min à 30,5 min) et de réveil (de 108,9 min à 82,6 min) ; une diminution du nombre d'éveils (de 3 à 1) et de mouvements périodiques des membres par heure de sommeil (de 29,6 à 6,8). Au contraire, il n’y avait pas de différences statistiquement significatives (p > 0,05) pour ces paramètres dans le groupe de patients recevant le placebo par rapport aux valeurs initiales. Comparativement au départ, aucun changement significatif de l’architecture du sommeil ni d’indices d’apnée-hypopnée n’a été signalé à la fin de l’essai dans les deux groupes à l’étude. Concernant l’amélioration de la qualité du sommeil, il y avait une diminution significative du score PSQI dans le groupe zolpidem (de 14 à 11) mais pas dans le groupe placebo. En ce qui concerne l’innocuité, trois des patients traités par zolpidem (dont 2 Child B et 1 Child A) ont présenté une somnolence excessive pendant la journée (celle-ci s'est améliorée dans les 24 heures suivant l'arrêt du traitement). Aucun patient n'a développé d'EH, d'hallucinations ou d'autres manifestations neuropsychiatriques au cours de la période de l'étude. La constipation était moins fréquente chez les patients sous placebo (n = 1) que chez les patients traités par zolpidem (n = 6). La consommation accrue de fibres alimentaires a permis de rétablir les habitudes de selles sans avoir besoin d’utiliser des laxatifs (ex. lactulose). Aucune différence significative n’a été observée entre les deux groupes en ce qui concerne les autres effets indésirables signalés (fatigue, céphalées, nausées/vomissements/diarrhées, sécheresse de la bouche, courbatures). D’après les conclusions des auteurs, un traitement de 4 semaines avec du zolpidem 5 mg/jour chez les patients atteints de cirrhose légère ou modérée entraîne une augmentation significative du temps total de sommeil et de l'efficacité du sommeil ainsi qu'une amélioration des paramètres polysomnographiques sans modification significative de l'architecture du sommeil. (Sharma 2019)

    Santos de Silva et collaborateurs ont rapporté un cas d’EH retardée induite par une dose unique de zolpidem 10 mg par voie orale chez une femme âgée de 73 ans souffrant d’insuffisance hépatique avancée. Avant son admission, la patiente était connue pour une démence à corps de Lewy, de l’hypertension artérielle et de l’insomnie transitoire. Elle a été admise en raison d'un ictère et d'une ascite datant d'une semaine avant son hospitalisation. Douze heures avant d’être hospitalisée, la patiente avait pris une dose de zolpidem 10 mg par voie orale (Santos de Silva 2008) L'examen physique a révélé des mouvements involontaires des membres supérieurs, une désorientation temporelle et spatiale, une jaunisse et un gonflement modéré de l'abdomen et de la cheville. Alors que les résultats de laboratoire étaient : AST 53 UI/L, ALT 65 UI/L, phosphatase alcaline 187 UI/L, albumine 1,3 g/dL, bilirubine 3,48 mg/dL et INR 1,75. Par ailleurs, l'examen échographique a révélé un foie rétréci à la surface irrégulière, sans dilatation biliaire et un nodule hypoéchogène de 3 cm dans le lobe gauche. Il y avait de petites varices œsophagiennes et une gastropathie hypertensive modérée. Un diagnostic de cirrhose cryptogénique compliquée d’un carcinome hépatocellulaire et d'ascite a été posé. Huit jours après son admission, la patiente présentait une détérioration aiguë de l’état de conscience (échelle de coma de Glasgow de 5) ainsi que des signes d’infection. Juste avant l'intubation endotrachéale, l’administration d’un bolus de 1 mg de flumazénil permis d’inverser rapidement l’EH attribuée au zolpidem (ingéré douze heures avant l’hospitalisation). À la lumière de cette situation, les auteurs concluent que le zolpidem peut précipiter l'EH de la même manière que les benzodiazépines. À cet effet, cet hypnotique doit être utilisé avec prudence chez les patients souffrant d’une cirrhose avancée compte-tenu que sa demi-vie pourrait être considérablement prolongée chez les insuffisants hépatique. De même, ils indiquent que le flumazénil est également un antagoniste des hypnotiques non benzodiazépines (ex. zolpidem), et pourrait être efficacement utilisé pour renverser l’EH induite par cette classe de médicaments. (Santos de Silva 2008)

    Kahn et collaborateurs ont rapporté un cas d’EH induite par le zolpidem chez un patient cirrhotique âgé de 49 ans souffrant de dépression majeure. Outre un trouble cognitif majeur et de l’insuffisance hépatique, le patient était connu pour une dépendance à l’alcool, l’asthme, l’hypertension artérielle ainsi que des antécédents d'hépatite C, de VIH et d'accident vasculaire cérébral. Il a été emmené à l’urgence en raison d'une humeur dépressive et des idées suicidaires. (Kahn 2012) Les examens réalisés à l’admission ont révélé des symptômes de dépression sévères, de la fatigue, une diminution du niveau d'énergie, de l'anhédonie ainsi que des idées suicidaires. Les tests de psychose ou de manie s’étaient avérés négatifs. Bien que l’utilisation de bupropion 300 mg par jour par la bouche ait permis d’améliorer considérablement l’humeur du patient, les troubles de sommeil ne s’étaient pas résolus. À cet effet, le zolpidem a été débuté à une dose allant jusqu'à 10 mg par jour. Suite à l’initiation du zolpidem, le patient est devenu de plus en plus isolé, paranoïaque, irritable et il refusait de manger ou prendre sa médication. De même, son état mental s'est détérioré considérablement, révélant de la confusion et une désorientation qui se sont exacerbées au point de ne plus pouvoir reconnaître les membres de sa famille. Le taux d’ammoniac sanguin a augmenté d’environ 3 fois après l’initiation de l’hypnotique (de 49 mg/dL à 141 mg/dL ). Quatre jours après l’arrêt du zolpidem, les symptômes secondaires à l’EH se sont améliorés et le taux d’ammoniac est revenu à 36 mg/dL. Étant donné que le zolpidem est métabolisé par une voie hépatique et que sa liaison aux protéines plasmatiques est nettement réduite en présence de cirrhose, les auteurs recommandent d’utiliser le zolpidem avec prudence chez les patients souffrant d’insuffisance hépatique et de considérer les facteurs pouvant augmenter les effets secondaires associés à cette molécule. (Kahn 2012)

    Les données concernant l’utilisation du zolpidem en présence d’insuffisance hépatique légère ou modérée démontrent qu’il y a un impact significatif de la cirrhose sur la pharmacocinétique du médicament, mais ces données sont peu abondantes. Plusieurs détails sont manquant dans les études rétrospectives évaluant l’efficacité et l’innocuité. De plus, l’utilisation du zolpidem à long terme (au-delà de 4 semaines) ne semble pas avoir été étudiée convenablement chez cette population. Le zolpidem n’est pas recommandé chez les patients de Child A ou Child B, particulièrement chez les personnes âgées, en raison de l’impact significatif sur les paramètres pharmacocinétiques de la cirrhose à ces stades. Étant donné que l’usage du zolpidem n’a pas été évalué chez les sujets présentant une insuffisance hépatique sévère (Child - Pugh C), l’utilisation de cette molécule est à éviter chez les patients Child - Pugh C en attendant la publication de données à ce sujet.

    Zopiclone

    Absorption

    Dose unique de 3,75 mg per os (Gaillot 1983)
    Tmax (h) : < 2
    Cmax (µg/L) : 30
    ASC0–24 (µg·hr/L) : 219

    Dose unique de 5 mg per os (Gaillot 1983)
    Tmax (h) : 0,5 à 1
    Cmax (µg/L) : 59,4
    ASC0–∞ (µg·hr/L) : 320

    Dose unique de 7,5 mg per os (Gaillot 1983, Parker 1983, Drover 2004)
    F (%) : 75
    Tmax (h) : 2
    Cmax (µg/L) : 64,4 ± 8,8
    ASC0–∞ (µg·hr/L) : 421

    Insuffisance hépatique

    Score Child-Pugh non précisé
    Dose unique de 7,5 mg per os (Parker 1983, Gaillot 1987)
    F (%) : 97 ± 39
    Tmax (h) : ~4
    Cmax (µg/L) : 62,7 ± 12,4
    Ratio ASC (cirrhotique/jeune sujet sain) : 1,43
    Ratio ASC (cirrhotique/sujet sain âgé de 60 à 68 ans) : 1,09

    Distribution

    Dose non spécifiée (Fernandez 1995)
    Liaison protéique (%) : 45 à 80
    VD (L) : ~92 à 140

    Dose unique de 15 mg per os (Gaillot 1983)
    VD (éq) (L) : 100

    Insuffisance hépatique

    Absence de données

    Métabolisme

    Dose non spécifiée (monographie)
    Métabolisme hépatique extensif.
    Voies métaboliques : CYP3A4 (majeur) et CYP2C8 (mineur).
    Décarboxylation (voie principale) : en métabolites inactifs
    Oxydation : en dérivé N-oxydé actif
    Déméthylation : en dérivé N-déméthylé inactif
    Métabolites actifs : oui, mais activité minime (dérivé-N-oxydé : ~11 à 15% de la dose)

    Insuffisance hépatique

    Absence de données

    Élimination

    Dose non spécifiée (monographie)
    t1/2 (h) : ~5 (3,5 - 6,5)
    CL plasmatique (L/h) : ~14
    CL rénale (L/h) : ~0,80
    Élimination hépatobiliaire : ~20%
    Élimination rénale : 75%
    % de la dose excrétée dans l’urine (sous forme inchangée) : ~4 à 5
    % de la dose excrétée dans l’urine (sous forme des métabolites) : 30
    Élimination pulmonaire : métabolites inactifs produits par décarboxylation oxydative sont partiellement excrétés sous forme de dioxyde de carbone.
    Excrété dans les fèces à 16%

    Dose unique de 7,5 mg per os (Gaillot 1983, Parker 1983)
    t1/2 (h) : 3,5 ± 0,33
    CL plasmatique (L/h) : 13,9
    CL rénale (L/h) : 0,83

    Dose unique de 7,5 mg per os chez les sujets âgés de 60 à 85 ans (Gaillot 1987)
    t1/2 (zopiclone) (h) : 8,1 ± 3,5

    Insuffisance hépatique

    Score Child-Pugh non précisé (monographie)
    t1/2 (h) : 11,9

    Dose unique de 7,5 mg per os (Parker 1983)
    t1/2 (h) : 8,53 ± 0,83
    CL plasmatique (L/h) : ~8,4 (↓ de ~40% de CL plasmatique)

    Dose unique de 7,5 mg per os chez les sujets âgés de 43 à 68 ans (Gaillot 1987)
    t1/2 (h) : 8,4 ± 3,5

    Recommandations de la monographie
    La zopiclone doit être utilisée avec précaution chez les patients présentant une insuffisance hépatique légère ou modérée (classe A ou B de Child Pugh). La demi-vie d’élimination est prolongée considérablement (11,9 heures) et l’apparition du pic plasmatique est retardée (3,5 heures) chez l’insuffisant hépatique. En conséquence, l’administration de doses plus faibles est recommandée chez ce type de patient. La dose initiale recommandée est de 3,75 mg/jour et celle-ci peut être augmentée avec prudence jusqu’à 5 mg/jour, selon l’efficacité et l’innocuité du traitement. La zopiclone est contre-indiquée chez les patients atteints d’insuffisance hépatique sévère.

    Dans l’étude de Parker et collaborateurs, une dose unique de zopiclone 7,5 mg par voie orale a été administrée à 7 patients souffrant de cirrhose et à 8 volontaires sains afin d’évaluer si les propriétés pharmacocinétiques du médicament étaient influencées par la cirrhose. Les auteurs ont également évalué la réponse à cet hypnotique en utilisant des mesures pharmacodynamiques objectives et subjectives. Au début de l’étude, deux patients cirrhotiques ont reçu la moitié de la dose recommandée de zopiclone (soit 3,75 mg) afin de déterminer le degré de sédation secondaire à ce médicament chez les patients souffrant d’insuffisance hépatique. (Parker 1983) Les patients cirrhotiques étaient âgés de 43 à 68 ans, environ 78 % étaient de sexe masculin et les causes de la cirrhose était l’alcool (n = 7) et l’étiologie cryptogénique (n = 2). Quatre avaient des taux d'albumine sérique inférieurs à 30 g/L, dont deux avaient une ascite ou un œdème périphérique, et aucun n'avait d'antécédent d'anastomose porto-systémique chirurgicale ni d'encéphalopathie. Bien que le score Child-Pugh des patients souffrant d’insuffisance hépatique n’ait pas été précisé, il semble que les patients présentaient minimalement une cirrhose Child B (albumine < 30 g/L et ascite) selon l’interprétation des informations mentionnées par les auteurs. En revanche, l’âge des sujets sains était de 20 à 23 ans et 50 % des patients étaient de sexe masculin. Aucun patient ne prenait de psychotrope ou de médicament agissant sur le système nerveux central (SNC). Tous les patients devaient s’abstenir de boire de l'alcool pendant au moins une semaine avant l'étude. (Parker 1983) Bien que les valeurs moyennes de Cmax aient été similaires entre les groupes à l’étude (sujets cirrhotiques : 62,7 ± 12,4 ng/mL vs sujets sains : 64,4 ± 8,8 ng/mL), l’apparition du pic plasmatique a été retardée chez les patients présentant une insuffisance hépatique comparativement aux participants sains (4 h vs 0,5 - 2 h respectivement). Il semble que l'élimination de la zopiclone était prolongée chez les patients cirrhotiques étant donné que la concentration plasmatique moyenne chez ces patients était augmentée de plus de trois fois par rapport à celle des sujets sains dans les 24 heures suivant la prise du médicament. De même, la demi-vie d’élimination était significativement plus longue chez les patients souffrant de cirrhose (8,53 ± 0,83 h) comparativement aux sujets sains (3,5 ± 0,33 h). Il a été noté une corrélation inverse entre la concentration sérique d'albumine et la demi-vie d'élimination de la zopiclone chez l’insuffisant hépatique. (Parker 1983) Concernant la réponse pharmacodynamique, la sédation secondaire à l’utilisation de la zopiclone a été observée dans les deux groupes à l’étude à la suite de l’administration du médicament. Cependant, l’effet maximal a été documenté à 2 heures chez les sujets sains et à 4 heures chez les patients cirrhotiques, ce qui était en correspondance avec l’apparition du pic plasmatique documenté pour chaque groupe. Bien que le temps de récupération ait été retardé chez les sujets souffrant de cirrhose par rapport aux participant sains, il a été complété au bout de 8 heures. De plus, la valeur moyenne de fréquence dominante était inférieure chez les patients cirrhotiques (8,3 ± 0,4) comparativement aux patients sains (9,4 ± 0,4) et il a été documenté une légère diminution de celle-ci 4 heures après la prise de zopiclone chez l’insuffisant hépatique (7,97 ± 0,35). Aucune détérioration des tests hématologiques ou biochimiques ainsi que de l’état clinique n’ont été signalés chez les patients souffrant de cirrhose. Étant donné que l’insuffisance hépatique entraîne une réponse retardée, prolongée et exagérée au zopiclone en modifiant sa pharmacocinétique, les auteurs concluent que cet hypnotique doit donc être utilisé avec prudence chez les patients souffrant de cirrhose. (Parker 1983)

    Gaillot et collaborateurs ont évalué l’influence de différentes modifications physiopathologiques (y compris l’insuffisance hépatique) sur les propriétés pharmacocinétiques de la zopiclone. Pour se faire, les participants ont été inclus dans 5 groupes différents : A) 45 sujets sains âgés de 18 à 45 ans ; B) et C) 19 sujets sains âgés de 60 à 85 ans ; D) 8 sujets cirrhotiques âgés de 43 à 68 ans, sans aucun signe d’encéphalopathie et avec un taux sérique d’albumine supérieur à 30 g/L ; et E) 18 sujets atteints d’insuffisance rénale. Dans le but d’évaluer l’impact de l’insuffisance hépatique sur la pharmacocinétique du médicament, une dose unique de zopiclone 7,5 mg par voie orale a été administrée à 8 patients souffrant de cirrhose et à 12 volontaires sains âgés de 20 à 45 ans appartenant au groupe A. Le score Child-Pugh des patients souffrant de cirrhose et l’étiologie de la maladie hépatique n’étaient pas précisés. (Gaillot 1987) Les concentrations plasmatiques de la zopiclone étaient plus élevées (↑43% de l’ASC), l’apparition du pic plasmatique a été retardée (Tmax = 3,5 h) et la biodisponibilité absolue était supérieure (F = 97 ± 39%) chez les patients présentant une insuffisance hépatique comparativement aux sujets sains âgés 20 à 45 ans (Tmax = 0,5 h et F = 77 ± 13%). De même, la quantité de zopiclone excrétée dans l’urine sous forme inchangée était significativement augmentée chez les patients cirrhotiques par rapport à leurs sujets sains respectifs, tandis que l'excrétion totale des métabolites était significativement réduite chez les premiers. Par ailleurs, la demi-vie d’élimination était prolongée considérablement chez les patients souffrant d’insuffisance hépatique (8,4 h) par rapport aux sujets sains (5,1 h). Les effets indésirables n’étaient pas rapportés. En raison de la clairance réduite de la zopiclone chez les patients souffrant d’insuffisance hépatique ainsi que le risque d'accumulation après un traitement chronique chez les patients sévèrement atteints, les auteurs concluent qu’il semble raisonnable de commencer le traitement à une dose plus faible (3,75 mg/jour) chez cette population. Ils indiquent également que la dose standard de 7,5 mg/jour peut être prescrite avec prudence chez les patients présentant une insuffisance hépatique légère à modérée. De plus, l'absorption retardée de la zopiclone nécessite de considérer la possibilité d'un début d'action retardé chez cette population. (Gaillot 1987)

    Les données concernant l’utilisation de la zopiclone en présence d’insuffisance hépatique légère ou modérée semblent rassurantes, mais sont peu abondantes. De plus, l’efficacité et l’innocuité de cet hypnotique ne semblent pas avoir été étudiées convenablement chez cette population. La zopiclone doit être utilisée avec précaution chez les patients cirrhotiques Child A ou Child B en raison de l’impact significatif sur les paramètres pharmacocinétiques de la cirrhose à ces stades. Compte-tenu que la demi-vie d’élimination est prolongée considérablement et que l’apparition du pic plasmatique est retardée chez l’insuffisant hépatique, l’administration de doses plus faibles est recommandée chez les patients présentant une cirrhose légère ou modérée. À cet effet, la dose initiale recommandée est de 3,75 mg/jour, qui peut être augmentée avec prudence jusqu’à 5 mg/jour selon l’efficacité et l’innocuité du traitement. En raison des données limitées, un suivi plus serré pourrait donc être recommandé, afin de balancer les effets hypnotiques et les effets indésirables chez les patients présentant une cirrhose légère ou modérée.

    Étant donné que l’usage de la zopiclone n’a pas été évalué chez les sujets présentant une insuffisance hépatique sévère (Child - Pugh C), l’utilisation de cet molécule est à éviter chez les patients Child - Pugh C en attendant la publication de données à ce sujet.

    Tel que remarqué par Gaillot et collaborateurs, l’âge semble avoir un impact significatif sur la pharmacocinétique du zopiclone. Ainsi, la prescription du zopiclone chez le patient cirrhotique devrait prendre en considération son âge.

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