Antiépileptiques

Dernière révision: 2025-03-22

Tableau résumé

médicament Child A Child B Child C
Brivaracétam Prudence, réduire de 25 % les doses d'initiation et de maintien Prudence, réduire de 25 % les doses d'initiation et de maintien Prudence, réduire de 25 % les doses d'initiation et de maintien
Lacosamide Sécuritaire Utiliser avec précaution (considérer réduire les doses de maintien) Absence de données (voir commentaires ci-dessous)
Lamotrigine Sécuritaire Prudence, réduire les doses à l'initiation et la titration d'environ 50 % Prudence, réduire les doses à l'initiation et la titration d'environ 75 %
Lévétiracétam Sécuritaire Sécuritaire Utiliser avec précaution (prudence si fonction rénale réduite)
Phénytoïne Absence de données (voir commentaires ci-dessous) Absence de données (voir commentaires ci-dessous) Absence de données (voir commentaires ci-dessous)
  • Brivaracétam (Brivlera®):
    • Intervalle thérapeutique habituel : 25 à 100 mg per os 2 fois par jour.
    • Formulations disponibles au Canada : comprimés à libération régulière de 10, 25, 50, 75, et 100 mg, liquide oral de 10 mg/mL et formulation injectable de 10 mg/mL.
  • Lacosamide (Vimpat®):
    • Intervalle thérapeutique habituel : 50 à 300 mg per os ou IV 2 fois par jour.
    • Formulations disponibles au Canada : comprimés à libération régulière de 50, 100, 150, et 200 mg, et formulation injectable à 10 mg/mL.
  • Lamotrigine (Lamictal®):
    • Intervalle thérapeutique habituel : 100 à 500 mg per os en 2 prises par jour.
    • Formulations disponibles au Canada : comprimés à libération régulière de 25, 100, et 150 mg et comprimés dispersibles de 2 et 5 mg.
  • Lévétiracétam (Keppra®):
    • Intervalle thérapeutique habituel : 1000 à 3000 mg per os en 2 prises par jour.
    • Formulations disponibles au Canada : comprimés à libération régulière de 250, 500, 750 et 1000 mg, liquide oral de 100 mg/mL et formulation injectable à 100 mg/mL.
  • Phénytoïne (Dilantin® et Dilantin Infatabs®):
    • Dose initiale usuelle : 300 à 400 mg per os en 1 à 4 prises par jour (et titration selon dosages sériques).
    • Formulations disponibles au Canada : capsules à longue action de 30 et 100 mg, comprimés croquables de 50 mg, suspension de 30 mg/5 mL et 125 mg/5 mL, et formulation injectable de 50 mg/mL.

Pharmacodynamie

Général

Encéphalopathie hépatique et épilepsie

L’encéphalopathie hépatique est une des complications majeures de la cirrhose, rapportée chez au moins 30 % des patients cirrhotiques. (Fallahzadeh 2022) La pathophysiologie de ce syndrome neuropsychiatrique est complexe. L’accumulation de neurotoxines (particulièrement l’ammoniac) au cerveau par un passage accru au travers de la BHE semble être un des mécanismes principaux. Cette accumulation survient en raison de l’incapacité du foie cirrhotique à métaboliser l’ammoniaque en urée ainsi que par le contournement du foie en raison de voies de dérivation porto-systémiques. Cliniquement, ce syndrome est classifié en 4 stades (classification de West-Haven) et sa présentation peut varier de la confusion légère au coma en passant par la désorganisation ou la léthargie. (Fallahzadeh 2022) Dans de rares cas, l’encéphalopathie hépatique sévère peut se présenter par des désordres convulsifs (des épilepsies partielles focales au status épilepticus) comme le décrivent certains rapports de cas. (Tern 2020) (Oliveiro 2022) D’autres rapports de cas mentionnent aussi l’exacerbation de crises épileptiques déjà connues par un épisode d’encéphalopathie hépatique. (Chowdhury 2019) Une étude de cohorte rétrospective danoise a d’ailleurs montré que 2,7 % d’une cohorte de patients avec cirrhose (n = 12976) avaient de l’épilepsie comme comorbidité et un risque de mortalité augmenté (« Mortality Adjusted Hazard Ratio » à 1,31). (Jepsen 2014) Ainsi, le recours à un traitement antiépileptique chez un patient cirrhotique est possible que ce soit en aiguë pour le traitement d’un status épilepticus ou de manière chronique pour le traitement de crises convulsives récurrentes. Il devient alors important pour le clinicien de connaître l’impact de la maladie hépatique sur les molécules afin de guider son choix de traitement.

Lacosamide

Cardiomyopathies associées à la cirrhose

Plusieurs revues de littérature décrivent la présence de cardiomyopathie chez les patients cirrhotiques. Cette pathologie se présente par des troubles cardiaques fonctionnels (dysfonction systolique et/ou diastolique) et électrophysiologiques (arythmies) et ceci, indépendamment de la présence d’une maladie cardiaque sous-jacente d’étiologie autre. (Mozos 2015) (Seirafi 2009) (Fede 2015) Parmi les troubles électrophysiologiques, l’allongement du segment QT est le plus commun, avec une prévalence allant jusqu’à 50 % chez les cirrhotiques, et ce risque est corrélé avec le stade de sévérité de la cirrhose. (Mozos 2015) Par son mécanisme d’action, le lacosamide provoque l’inactivation lente des canaux sodiques voltage-dépendants et peut altérer l’électrophysiologie cardiaque où ses canaux se retrouvent aussi. (Yang 2024) Les études de pharmacovigilance rapportent des effets indésirables cardiaques tels que des blocs auriculo-ventriculaires associés à une prolongation de l’intervalle PR, de la fibrillation auriculaire ou encore de la tachycardie ventriculaire. (UCB Pharma 2022) (Yadav 2021) (Yang 2024) Des revues de littérature ont estimé leur incidence à l’ordre de 0,7 à 1,2 %. (Yang, 2024) Aucune donnée trouvée dans la littérature ne décrit la survenue de ces effets indésirables cardiaques chez les patients cirrhotiques. Une étude randomisée contrôlée chez des volontaires sains a cependant démontré l’innocuité de la molécule quant au risque de prolongation de l’intervalle QT. (Kropeit 2015) Ainsi, l’usage du lacosamide en cirrhose ne soulève présentement pas de préoccupations majeures concernant son innocuité cardiaque, mais les cliniciens devraient rester attentifs à ces effets indésirables chez des patients avec un risque de base potentiellement augmenté.

Lamotrigine

Risque de réactions d’hypersensibilité cutanées

L’utilisation de la lamotrigine est associée à des effets indésirables dermatologiques de l’ordre de 5 à 10 %, pouvant varier du rash bénin aux réactions cutanées sévères (syndrome de Stevens-Johnson, syndrome de DRESS) dans des cas plus rares. (Messenheimer 1998) (Wang 2015) Plusieurs études ont examiné les facteurs prédicteurs de ces réactions chez les patients exposés au médicament. Les éléments qui ressortent sont les doses initiales trop élevées, une titration trop rapide ou encore l’usage concomitant d’acide valproïque (inhibiteur du métabolisme de la lamotrigine). (Hirsch 2006) (Messenheimer 1998) Ces facteurs semblent favoriser des concentrations plasmatiques trop élevées de lamotrigine en début de traitement et provoquer l’apparition de ces réactions, qui surviennent surtout dans les 8 premières semaines de traitement. (Messenheimer 1998) (Mani 2019) Aucune étude retrouvée dans la littérature n’a décrit l’incidence de ces effets indésirables chez les patients cirrhotiques. Cependant, un risque théorique serait une exposition accrue (ASC) à la lamotrigine causée par l’insuffisance hépatique qui pourrait potentiellement augmenter le risque d’effet indésirable cutané. Ainsi, les cliniciens devraient demeurer vigilants lors de l’emploi de lamotrigine chez le patient cirrhotique, prenant soin de bien évaluer la fonction hépatique de même que les interactions pharmacocinétiques, particulièrement à l’initiation du traitement.

Risque de dyscrasies sanguines

Plusieurs études transversales rapportent une prévalence élevée de dyscrasies sanguines (anémie, thrombopénie, leucopénie) chez les patients cirrhotiques, variant entre 6 % et 77 %. (Fiero-Angulo 2024) Ces troubles hématologiques sont attribuables à des causes multiples, notamment une suppression médullaire, une altération des facteurs stimulant la moelle osseuse, ainsi qu’une séquestration splénique et splanchnique. (Lingas 2023) (Fiero-Angulo 2024) Dans la littérature, des cas de dyscrasies sanguines (leucopénie, anémie, thrombopénie) ont été décrits chez des patients exposés à la lamotrigine, un effet indésirable également mentionné dans la monographie du médicament. (Chiu 2007) (Salem 2021) L’incidence reste difficile à quantifier en raison de leur rareté, et d’un mécanisme qui ne serait pas complètement élucidé. Plusieurs hypothèses sont avancées, incluant une réaction d’hypersensibilité ou une toxicité médullaire directe par un des métabolites du médicament. (Chiu 2007) (Salem 2021) Cependant, les rapports de cas soulignent que certains facteurs pourraient contribuer à ces réactions, tels qu’une dose initiale trop élevée, une titration trop rapide ou la co-administration d’un inhibiteur de la glucuronidation. (Chiu 2007) (Salem 2021) Aucune revue de littérature ne suggère que ces effets indésirables soient plus fréquents ou plus sévères chez les patients cirrhotiques. Cependant, compte tenu de la prévalence déjà élevée des dyscrasies sanguines dans cette population ainsi que d’une possible augmentation de l’exposition au médicament en raison de l’insuffisance hépatique, une vigilance accrue est recommandée lors de l’initiation de la lamotrigine. Il faut faire preuve de prudence et monitorer ces patients afin de détecter toute aggravation ou apparition de troubles hématologiques liés au traitement.

Lévétiracetam

Effets indésirables neuropsychiatriques

Les effets indésirables neuropsychiatriques sont fréquents avec les antiépileptiques et responsables d’enjeux d’inobservance, d’arrêts de traitement en plus de limiter l’optimisation de la thérapie. (Chen 2017) Malgré leur profil de tolérance globalement favorable, certains agents de nouvelle génération, comme le lévétiracétam, peuvent entraîner des effets indésirables neuropsychiatriques rares et potentiellement graves. (Hakami 2021) En effet, certains patients exposés au médicament développent des symptômes comportementaux (agitation, hostilité, agressivité, labilité émotionnelle) et psychotiques (psychose, hallucinations). (Cramer 2003) (Zhang 2022) (Tao 2024) Cependant, il est difficile de quantifier la fréquence de ces effets indésirables, car les études et revues systématiques sur le sujet présentent une grande hétérogénéité dans les populations étudiées, les critères d’inclusion et d’exclusion, ainsi que dans la définition des termes utilisés pour décrire ces événements. (Chen 2017) Par ailleurs, aucune étude ou rapport de cas n’a décrit la survenue de ces effets indésirables chez des patients cirrhotiques. Toutefois, un risque théorique potentiel serait de confondre les symptômes neuropsychiatriques induits par les antiépileptiques et ceux de l’encéphalopathie hépatique. Tel que reconnu dans la classification de West Haven de l’encéphalopathie hépatique, des symptômes communs tels que l’anxiété, les changements dans la personnalité ou les comportements inappropriés sont potentiellement associés à la maladie. (Fallahzadeh 2022) Ainsi, les cliniciens devraient rester vigilants en cas d’altération de l’état neuropsychiatrique chez leurs patients cirrhotiques recevant des médicaments à risque, comme le lévétiracétam.

Phénytoïne

Encéphalopathie

La phénytoïne est un médicament qui, en raison de sa pharmacocinétique non linéaire, saturable et dose dépendante, peut rapidement s’accumuler pour atteindre des concentrations plasmatiques hors de l’intervalle thérapeutique habituel (10 à 20 mg/mL ou 40 à 80 mcmol/L). (Asconapé 2014) Ainsi, il n’est pas rare de voir des intoxications (aiguës ou chroniques) à la phénytoïne qui se manifestent généralement par des effets indésirables neurologiques comme le nystagmus, l’ataxie ou encore de la confusion. (Pfizer 2019) De plus, la littérature suggère l’existence d’un syndrome clinique distinct, l’encéphalopathie induite par la phénytoïne. (Reynolds 1975) Ce terme, qui n’est pas clairement défini sur le plan médical, est parfois employé de manière interchangeable avec l’intoxication à la phénytoïne par certaines sources, potentiellement à tort. Une revue de littérature de Reynolds en 1975 sur la toxicité des antiépileptiques en fait mention. Ce syndrome correspondrait à une dysfonction neurologique accompagnée de troubles du comportement, pouvant survenir en cas d’intoxication, mais également à des concentrations thérapeutiques normales de phénytoïne. Son installation serait plus insidieuse que celle de l’intoxication classique à la phénytoïne. La revue, ainsi que quelques rares rapports de cas, décrivent des manifestations telles que : altération des capacités intellectuelles, troubles neurologiques focaux, augmentation des crises convulsives, changements perceptibles à l’EEG, avec ou sans la présence des symptômes plus « classiques » comme le nystagmus ou l’ataxie. (Reynolds 1975) (Zwarts 1985) (Ambrosetto 1977) Parallèlement, une des complications majeures de la cirrhose est l’encéphalopathie hépatique qui se présente aussi par un continuum de symptômes neurologiques comme la confusion, l’ataxie ou la léthargie, selon la sévérité. (Fallahzadeh 2022) Ainsi, le tableau clinique des effets indésirables neurologiques de la phénytoïne peut croiser assez facilement celui de l’encéphalopathie hépatique. (Sandford 1987) Chez un patient atteint de cirrhose, qui peut présenter un métabolisme altéré de la phénytoïne, cela nécessite une attention particulière lors de la prise en charge, avec des investigations appropriés (dosages plasmatiques de phénytoïne) afin de bien diagnostiquer et traiter le patient.

Innocuité cardiovasculaire

La phénytoïne, en plus de ses propriétés antiépileptiques, possède une action antiarythmique de classe IB via son effet sur les canaux sodiques voltage-dépendants. Elle a ainsi été utilisée par voie intraveineuse (IV) dans certaines indications cardiovasculaires (tachycardie ventriculaire, fibrillation auriculaire), bien que cet usage soit aujourd’hui limité au profit d’autres molécules. (Guldiken 2016) Paradoxalement, l’une des craintes liées à l’utilisation IV de la phénytoïne est le risque d’effets indésirables cardiovasculaires tels que la bradycardie, l’hypotension, les arythmies ou l’exacerbation des tachycardies ventriculaires. (Guldiken 2016) Une revue de la littérature couvrant la période de 1946 à 2014 publiée en 2015 par Guldiken et collaborateurs a analysé le profil d’innocuité cardiaque de la phénytoïne. Chez les patients ayant reçus de la phénytoïne IV, la revue a montré que le développement et la gravité des effets indésirables cardiaques étaient principalement reliés à un taux d’infusion trop rapide (> 50 mg/min). Les auteurs de la revue ont donc conclu que la phénytoïne par voie intraveineuse est sécuritaire à des taux d’infusion < 50 mg/min dans la population générale et de 25 mg/min chez les patients de plus de 50 ans ou avec des comorbidités. Cette revue n’a également trouvé aucune association entre l’administration intraveineuse de phénytoïne et l’allongement de l’intervalle QT. Concernant l’administration par voie orale, les effets indésirables cardiovasculaires n’étaient pas rapportés, à l’exception du cas unique d’un patient présentant une hypoalbuminémie et une intoxication chronique sévère à la phénytoïne (91 mcg/mL à l’admission), dont la gravité a été initialement masquée par un état de base végétatif. (Su 2009) Les auteurs de la revue ont aussi conclu que la phénytoïne par voie orale est sécuritaire et présente un profil d’innocuité cardiaque favorable. Cette revue ou d’autres études dans la littérature n’ont pas étudié ces effets indésirables spécifiquement chez des patients atteints de cirrhose. Ces derniers ont un risque cardiovasculaire augmenté en raison de cardiomyopathies associées à la cirrhose qui se présentent avec des troubles cardiaques fonctionnels (dysfonction systolique et/ou diastolique) et électrophysiologiques (arythmies), notamment l’allongement de l’intervalle QT présent chez environ 50% des patients. (Mozos 2015) De plus, en raison de la cirrhose, ils sont plus à risque d’avoir un métabolisme hépatique altéré de la phénytoïne et de présenter des intoxications. Cependant, à la lumière des données disponibles dans la littérature sur le médicament, son usage ne soulève pas d’inquiétude flagrante sur le plan cardiovasculaire même en cirrhose, bien que la vigilance reste de mise.

Médicaments

Brivaracétam

Absorption

Monographie
Comprimés à libération régulière :
F : 100 %
Tmax (h) : 1 (0,25 à 3)

Dose unique de 100 mg per os (Stockis 2013)
Tmax (h) : 1 (0,5 à 1,5)
Cmax (mcg/mL) : 2,86 (CV 39,3 %)
ASC (mcg·hr/mL) : 29,7 (CV 25,2 %)

Insuffisance hépatique

Dose unique de 100 mg per os (Stockis 2013)

Child A :
Tmax (h) : 0,5 (0,5 à 2)
Cmax (mcg/mL) : 3,21 (CV 17,4 %)
ASC (mcg·hr/mL) : 44,6 (CV 41,1 %)

Child B :
Tmax (h) : 0,5 (0,5 à 1)
Cmax (mcg/mL) : 2,86 (CV 14,3 %)
ASC (mcg·hr/mL) : 46,7 (CV 17,4 %)

Child C :
Tmax (h) : 0,5 (0,5 à 1,5)
Cmax (mcg/mL) : 2,62 (CV 26,6 %)
ASC (mcg·hr/mL) : 47,1 (CV 16,2 %)

Distribution

Monographie
Liaison protéique : ≤ 20 %
VD (L/kg) : 0,5

Dose unique de 100 mg per os (Stockis 2013)
Vz/F (L/kg) : 0,60 (CV 17,6 %)

Insuffisance hépatique

Dose unique de 100 mg per os (Stockis 2013)
Child A : Vz/F (L/kg) : 0,66 (CV 12,5 %)
Child B : Vz/F (L/kg) : 0,68 (CV 9,35 %)
Child C : Vz/F (L/kg) : 0,70 (CV 13,1 %)

Métabolisme

Monographie; Mumoli 2015
Métabolisme hépatique et autre

Voies métaboliques :
Voie majeure : Hydrolyse de la fraction amide et formation du métabolite acide carboxylique par les amidases hépatiques et extra-hépatiques.
Voie secondaire : hydroxylation et formation du métabolite hydroxylé par l'isoenzyme hépatique CYP2C19
Combinaison de ces 2 voies métaboliques: formation du métabolite acide hydroxylé par hydroxylation de la chaîne latérale propyle sur le métabolite acide carboxylique par l’isoenzyme hépatique CYP2C9

Métabolites actifs : non

Insuffisance hépatique

Stockis 2013
Augmentation de la formation du métabolite acide carboxylique et diminution de la formation du métabolite hydroxylé en fonction de la sévérité de l’insuffisance hépatique.

Élimination

Monographie; Mumoli 2015
t1/2 (h) : 9
CL/F (mL/min/kg) : 0,83

Élimination par voie métabolique et excrétion urinaire de > 95% de la dose, excrétion fécale < 1 %.
Excrétion urinaire : < 10 % sous forme inchangée, 34 % sous forme du métabolite acide carboxylique, 15,9 % sous forme du métabolite hydroxylé, 15,2 % sous forme du métabolite acide hydroxylé.

Dose unique de 100 mg per os (Stockis 2013)
t1/2 (h) : 9,8 (CV 30 %)
CL/F (mL/min/kg) : 0,71 (CV 26,4 %)
CLrénale (mL/min/kg) : 0,053 (CV 51,5 %)
CLnon-rénale (mL/min/kg) : 0,651 (CV 29,2 %)

Insuffisance hépatique

Dose unique de 100 mg per os (Stockis 2013)

Child A
t1/2 (h) : 14,2 (CV 24,5 %)
CL/F (mL/min/kg) : 0,54 (CV 26,2 %)
CLrénale (mL/min/kg) : 0,044 (CV 53,0 %)
CLnon-rénale (mL/min/kg) : 0,489 (CV 27,1 %)

Child B
t1/2 (h) : 16,4 (CV 10,4 %)
CL/F (mL/min/kg) : 0,48 (CV 14,5 %)
CLrénale (mL/min/kg) : 0,031 (CV 74,7 %)
CLnon-rénale (mL/min/kg) : 0,444 (CV 13,4 %)

Child C
t1/2 (h) : 17,4 (CV 10,8 %)
CL/F (mL/min/kg) : 0,46 (CV 13,7 %)
CLrénale (mL/min/kg) : 0,039 (CV 42,7 %)
CLnon-rénale (mL/min/kg) : 0,423 (CV 12,8 %)

Recommandations de la monographie
Il faut envisager de réduire la dose de départ à 25 mg 2 fois par jour (50 mg par jour). La dose maximale recommandée chez les patients atteints d’insuffisance hépatique, peu importe le stade de la maladie, est de 75 mg 2 fois par jour (150 mg par jour).

Dans la littérature, une étude menée par Stockis et collaborateurs en 2013 a évalué les paramètres pharmacocinétiques du brivaracétam chez des sujets cirrhotiques suite à l’administration d’une dose unique de 100 mg per os. L’étude incluait 20 patients cirrhotiques (6 Child-Pugh A, 7 Child-Pugh B et 7 Child-Pugh C) comparés à un groupe témoin de 6 sujets sains, pour une population totale de 26 patients. En cirrhose légère, les paramètres pharmacocinétiques du médicament étaient altérés par rapport aux volontaires sains. Les auteurs ont observé une exposition accrue au médicament (ASC de 44,6 contre 29,7 mcg·hr/mL), un temps de demi-vie allongé (14,2 contre 9,8 h) et une clairance d’élimination totale du médicament réduite (0,54 contre 0,71 mL/min/kg). L’exposition accrue au médicament en cirrhose légère était similaire à celle observée en cirrhose modérée et sévère (ASC de 46,7 et 47,1 mcg·hr/mL respectivement). En cirrhose modérée et sévère respectivement, les clairances d’élimination étaient aussi plus basses (0,48 et 0,46 contre 0,71 mL/min/kg), et les temps de demi-vie plus longs (16,4 et 17,4 contre 9,8 h) par rapport au groupe contrôle. Les auteurs ont rapporté que le médicament était bien toléré, avec des effets indésirables (somnolence, vertiges) légers à modérés, dont l’incidence était similaire entre les groupes. (Stockis 2013)

Une étude de modélisation pharmacocinétique menée par Li et collaborateurs en 2024 s’est intéressée à la cinétique du brivaracétam chez les personnes âgées atteintes d’insuffisance hépatique. Les auteurs ont entraîné un modèle mathématique à l’aide des données physicochimiques de la molécule, des données pharmacocinétiques issues d’études cliniques sur le médicament et de données sur les caractéristiques physiologiques de divers groupes de populations. Leur modèle a d’abord été validé pour une population d’adultes en santé avant d’être extrapolé chez une population souffrant d’insuffisance hépatique. Les auteurs ont donc simulé l’administration de doses multiples de 50 mg per os bid (100 mg/jour) jusqu’à l’atteinte d’un état d’équilibre des concentrations plasmatiques chez des patients cirrhotiques (Child-Pugh A à C), comparativement à des patients sains. Les résultats obtenus étaient les suivants : ratio d’ASC (cirrhotiques/patients sains) de 1,53; 1,70 et 1,74 en cirrhose Child-Pugh classe A à C respectivement. En cirrhose légère, le ratio de 1,53 est comparable au ratio de 1,50 observée dans l’étude de Stockis et collaborateurs. En cirrhose modérée et sévère respectivement, les ratios de l’étude de modélisation (1,70 et 1,74) étaient légèrement augmentés par rapport à l’étude clinique (1,58 et 1,59), sans être toutefois complètement discordants (probablement vu l’âge des patients dans le modèle). (Li 2024)

Une étude de modélisation pharmacocinétique menée par Qayyum et collaborateurs en 2024 s’est aussi intéressée à la cinétique du brivaracétam, autant chez des patients en santé que chez la population atteinte d'insuffisance hépatique. Les auteurs ont eux aussi entraîné un modèle mathématique à l’aide des données physicochimiques du brivaracétam, des données pharmacocinétiques issues d’études cliniques sur le médicament et de données sur les caractéristiques physiologiques de divers groupes de populations. Une fois le modèle validé auprès d’une population virtuelle saine, il a été extrapolé à l’insuffisance hépatique, afin de prédire des données pharmacocinétiques suite à l’administration d’une dose unique de 100 mg per os. Les auteurs rapportent des ASC prédites de (43,0; 39,12 et 36,90 mcg·hr/mL) et une clairance plasmatique de (2,312; 2,510 et 2,910 mL/min/kg) pour les patients Child-Pugh A à C respectivement. Les auteurs n’ont pas corrélé ces données à des valeurs prédites chez une population saine, afin d’établir des ratios de comparaison. De plus, les auteurs n’expliquent pas certains résultats qui semblent contradictoire dans leur simulation, comme la baisse de l’exposition (ASC) au brivaracétam ainsi que l’augmentation de la clairance avec la progression de l’insuffisance hépatique. (Qayyum 2024)

En considérant les données retrouvées dans la littérature, l’usage du brivaracétam chez les patients atteints de cirrhose légère à sévère semble rassurant, mais nécessite des ajustements de doses. En effet, l’étude clinique de Stockis et collaborateurs montre une augmentation de l’exposition de l’ordre de 50 à 60 %, peu importe le degré de l’insuffisance hépatique, malgré des variations dans les autres paramètres tels que la clairance et la demi-vie. Ces résultats sont similaires à l’étude de modélisation de Li et collaborateurs qui montre une exposition augmentée de l’ordre de 53 à 74 % en cirrhose. La légère différence entre les 2 études pourrait être due à un effet d’accumulation dans l’étude de simulation, car l’ASC est prédite à l’état d’équilibre et non suite à une dose unique. De plus, l’étude de simulation de Qayyum et collaborateurs prédit des valeurs d’ASC en insuffisance hépatique qui se comparent avec l’étude de clinique de Stockis. À la lumière de ces résultats, il est prudent de recommander un ajustement des doses initiales et de maintien à environ 75 % des doses usuelles (diminuer de 25 % la dose), en faisant preuve de prudence chez les patients avec cirrhose plus avancée, comme le score Child le plus élevé étudié était de 11 dans l’étude clinique de Stockis.

Lacosamide

Absorption

Monographie
Comprimés à libération régulière :
F : 100 %
Tmax (h) : 0,25 à 4

Dose unique de 200 mg per os (UCB Pharma 2010)
Tmax (h) : 0,75 (0,25 à 4)
Cmax (mcg/mL) : 5,03
ASC (mcg·hr/mL) : 88,61

Insuffisance hépatique

Dose de 200 mg per os 1 fois par jour pour 4,5 jours (UCB Pharma 2010)

Child A :
Absence de données

Child B :
ASC : augmentée de 50 à 60 % par rapport au groupe sain

Child C :
Absence de données

Distribution

Monographie
Liaison protéique : < 15 %
VD (L/kg) : 0,6

Insuffisance hépatique

Absence de données

Métabolisme

Monographie
Métabolisme hépatique

Voies métaboliques :
CYP2C19, CYP2C9 et CYP3A4 : formation du métabolite majeur inactif O-desmethyl-lacosamide (environ 50 % des métabolites) par déméthylation.
Métabolites mineurs : fraction polaire de structure inconnue (environ 1/3 des métabolites), p-hydroxy-lacosamide par hydroxylation et désacetyl-lacosamide par désacétylation

Métabolites actifs : non

Insuffisance hépatique

Absence de données

Élimination

Monographie
t1/2 (h) : 13

Élimination rénale (95 % de la dose excrétée dans l’urine) et < 0,5 % dans les fèces.
L’excrétion urinaire est à 40 % sous forme inchangée, < 30 % sous forme du métabolite O-desmethyl-lacosamide, < 20 % sous forme de la fraction polaire de structure inconnue et autres métabolites mineurs en faible quantité (0,5-2 %).

Dose unique de 200 mg per os (UCB Pharma 2010)
t1/2 (h) : 13,96

Insuffisance hépatique

Absence de données

Recommandations de la monographie
On recommande que la dose maximale administrée chez les patients présentant une insuffisance hépatique légère à modérée soit de 300 mg/jour. L’augmentation de la dose doit être réalisée avec prudence, et une surveillance étroite s’impose chez ces patients. La pharmacocinétique du lacosamide n’a pas été étudiée chez les patients atteints d’une insuffisance hépatique grave. Par conséquent, l’emploi de lacosamide n’est pas recommandé dans cette population.

Une petite étude pharmacocinétique interne (n = 8) menée par le fabricant a évalué l’administration du lacosamide à une dose de 200 mg/jour pour 4,5 jours chez des patients atteints de cirrhose modérée (Child-Pugh B). (UCB Pharma 2022) (Cawello 2015) L’étude et ses données pharmacocinétiques ne sont pas disponibles, mais les monographies américaines et canadiennes du fabricant rapportent une augmentation de l’exposition au médicament (ASC) de l’ordre de 50 à 60 % chez les patients Child-Pugh B, comparativement aux patients non cirrhotiques. La monographie européenne du fabricant précise que la fonction rénale des patients Child-Pugh B à l’étude était réduite, sans la quantifier. Elle indique également que la réduction de la clairance non rénale ne contribuerait qu'à 20 % de l’exposition accrue au médicament (ASC) observée en cirrhose modérée. (Cawello 2015)

Une récente étude de modélisation pharmacocinétique menée par Zhu et collaborateurs en 2024 s’est intéressée à la cinétique du lacosamide chez diverses populations, incluant des patients cirrhotiques. Un modèle mathématique a été entraîné à l’aide des données physicochimiques du lacosamide, des données pharmacocinétiques issues d’études cliniques sur le médicament et de données sur les caractéristiques physiologiques de divers groupes de populations. La validité du modèle a été établie en simulant la pharmacocinétique chez une population virtuelle européenne (n = 50) de patients en santé, puis en comparant les résultats prédits aux données observées dans des études cliniques. Afin de valider le modèle chez les patients insuffisants hépatiques, une première simulation a été réalisée en cirrhose modérée (Child-Pugh B). Le modèle a prédit un ratio d’ASC (cirrhotiques Child-Pugh B/patients sains) de 1,48, ce qui est comparable avec l’étude du fabricant, où une augmentation de l’exposition de l’ordre de 50 à 60 % était observée en cirrhose modéré (ratio d’ASC de 1,5 à 1,6). Ainsi, les auteurs ont simulé l’administration d’une dose unique de 200 mg per os afin de prédire l’ASC et le Cmax chez l’ensemble des patients cirrhotiques. Respectivement chez les patients de Child-Pugh A à C, le ratio prédit pour l’ASC était de 1,26; 1,48 et 3,05. Pour le Cmax, le ratio prédit était de 0,93, 0,92 et 0,90. Les auteurs mentionnent également que dans leur modélisation, la clairance à la créatinine des patients Child-Pugh C était réduite d’environ 50 % par rapport au groupe contrôle, basé sur des données physiologiques caractérisant ces patients provenant de la littérature. (Zhu 2024)

Un rapport de cas publié en 2014 par Romigi et collaborateurs décrit l'utilisation du lacosamide chez un patient de 64 ans atteint de cirrhose alcoolique (stade Child-Pugh B, score MELD de 14) pour traiter des crises épileptiques focales secondaires à une hémorragie intracérébrale. Initialement contrôlé par le lévétiracétam (3000 mg/jour), le patient a présenté une récidive de ses crises, conduisant à l'ajout de lacosamide 100 mg bid titré à 200 mg bid en dose d’entretien. Le traitement s'est avéré efficace, avec une absence de crises notée par les auteurs au premier suivi à 6 mois. Cependant, sa fonction hépatique s'est détériorée par la suite (Child-Pugh C, score MELD de 20). La dose de lacosamide a été réduite à 200 mg/jour, en raison d'une crainte d'hépatotoxicité liée à une augmentation de l'exposition au médicament (ASC). Le traitement est resté efficace, mais le patient est décédé environ 6 mois plus tard. L’étude ne mentionne pas explicitement la tolérance au lacosamide, mais les auteurs indiquent qu’ils avaient tenté puis cesser la prégabaline (somnolence diurne excessive) et le phénobarbital (stuporeux, changement de l’état mental) à cause d’effets indésirables. La fonction rénale du patient n’était pas mentionnée par les auteurs. (Romigi 2014)

Le profil pharmacocinétique du médicament, les données de la monographie et celle de l’étude de modélisation sont rassurantes quant à un usage du lacosamide en cirrhose légère, sans ajustement de dose. En cirrhose modérée, l’exposition accrue de 20 % due à la clairance non rénale encourage la prudence par une réduction d’environ 25% des doses de maintien. Toutefois, l’usage de doses plus élevées que 300 mg/jour (maximum recommandé par la monographie en cirrhose modérée) semble acceptable si la condition le justifie et en présence d’un suivi adéquat. Un rapport de cas décrit l'utilisation sécuritaire d’une dose de 400 mg/jour chez un patient Child-Pugh B. En cirrhose sévère, l’usage ne peut être recommandé d’emblée, vu le manque de données cliniques et la crainte d’une exposition fortement accrue au médicament, renforcée par l’étude de modélisation pharmacocinétique de Zhu et collaborateurs. Toutefois, un rapport de cas décrit l’utilisation à dose de 200 mg/jour chez un patient déjà sous traitement avant la détérioration de sa cirrhose modérée en sévère. En cas de manque d’options thérapeutiques, un clinicien pourrait considérer le lacosamide à faible dose en évaluant la balance risque-bénéfices et dans un processus de décision partagée avec son patient.

Lamotrigine

Absorption

Monographie
Comprimés à libération régulière et comprimés dispersables :
F : 98 %
Tmax (h) : 1,4 à 4,8

Dose unique de 100 mg per os (Marcellin 2001)
Tmax (h) : 1
Cmax (mcg/mL) : 1,70
ASC (mcg·hr/mL) : 66,5

Insuffisance hépatique

Dose unique de 100 mg per os (Marcellin 2001)
Child A :
Tmax (h) : 1
Cmax (mcg/mL) : 1,40
ASC (mcg·hr/mL) : 76,3

Child B :
Tmax (h) : 1
Cmax (mcg/mL) : 1,58
ASC (mcg·hr/mL) : 120

Child C :
Tmax (h) : 2
Cmax (mcg/mL) : 1,56
ASC (mcg·hr/mL) : 197

Distribution

Monographie
Liaison protéique : 55 %
VD/f (L/kg) : 0,9 à 1,4

Dose unique de 100 mg per os (Marcellin 2001)
Vz/f (L/kg) : 0,98

Insuffisance hépatique

Dose unique de 100 mg per os (Marcellin 2001)
Child A : Vz/f (L/kg) : 1,06
Child B : Vz/f (L/kg) : 1,21
Child C : Vz/f (L/kg) : 1,01

Métabolisme

Monographie
Métabolisme hépatique

Voies métaboliques :
UGT (UDP-glucuronyltransférase) : Glucuroconjugaison et formation du métabolite majeur 2-N-glucoro-conjugué (> 75 %) ainsi que d’autres métabolites.

Métabolites actifs : Non

Insuffisance hépatique

Absence de données

Élimination

Monographie
t1/2 (h) : 32,8 après une dose unique; 25,4 à l’état d’équilibre chez l’adulte.
Demi-vie variable selon l’âge et la présence d’inducteurs ou inhibiteurs des UGT.

CL/F (mL/min/kg) : 0,44 pour une dose unique et 0,58 après des doses multiples chez l’adulte.
Clairance variable selon l’âge et la présence d’inducteurs ou inhibiteurs des UGT.

Élimination urinaire (94 % de la dose) et 2 % dans les fèces.
Excrétion urinaire : 10 % sous forme inchangée, 76 % sous forme du métabolite majeur 2-N-glucoro-conjugué, 10% sous forme de 5-N-glucoro-conjugué, 0,14 % sous forme du métabolite 2-N-méthyl et 4 % sous forme de métabolites mineurs non identifiés.

Dose unique de 100 mg per os (Marcellin 2001)
t1/2 (h) : 31,7
CL/F (mL/min/kg) : 0,36

Insuffisance hépatique

Dose unique de 100 mg per os (Marcellin 2001)
Child A
t1/2 (h) : 42,5
CL/F (mL/min/kg) : 0,29

Child B
t1/2 (h) : 64,5
CL/F (mL/min/kg) : 0,22

Child C
t1/2 (h) : 90,9
CL/F (mL/min/kg) : 0,13

Recommandations de la monographie
On recommande de réduire les doses initiales et intermédiaires ainsi que les doses d’entretien d’environ 50 % chez les patients présentant une atteinte hépatique légère ou modérée (stade A ou B selon la classification de Child-Pugh). Il est recommandé de réduire les doses initiales et intermédiaires ainsi que les doses d’entretien d’environ 75 % en présence d’une atteinte hépatique sévère (stade C selon la classification de Child-Pugh). Les doses d’entretien peuvent être ajustées en fonction de la réponse clinique et de la tolérance.

Une étude clinique menée en 2001 par Marcellin et collaborateurs a évalué les paramètres pharmacocinétiques de la lamotrigine chez des sujets cirrhotiques suite à l’administration d’une dose unique de 100 mg per os. L’étude incluait 24 patients cirrhotiques (12 Child-Pugh A, 7 Child-Pugh B et 5 Child-Pugh C) comparés à un groupe témoin de 12 sujets sains, pour une population totale de 36 patients.

Précision sur la classification des groupes à l’étude de Marcellin et collaborateurs 2001

Dans cette étude, les patients ne sont pas uniquement classés selon leur score Child-Pugh, mais également en fonction de paramètres cliniques, tels que la présence d’ascite. Les auteurs définissent 3 groupes expérimentaux: cirrhose modérée, cirrhose sévère sans ascite et cirrhose sévère avec ascite. Pour la simplicité de notre analyse et une uniformité avec nos autres fiches, nous allons renommer ces groupes. Les 12 patients du groupe « cirrhose modérée » avaient tous un score Child-Pugh de 5, plutôt représentatif d’une cirrhose légère. Les 7 patients du groupe « cirrhose sévère sans ascite » avaient un score Child-Pugh médian de 9 (variant entre 7 et 10), plutôt représentatif d’une cirrhose modérée. La monographie américaine indique que 2 des 7 patients avaient un score Child-Pugh de 10, ce qui relève normalement d’une cirrhose sévère. Cependant leurs paramètres cliniques (absence d’ascite) et pharmacocinétiques semblaient plus compatibles avec la cirrhose modérée selon les auteurs, justifiant leur inclusion dans ce groupe. Enfin, le troisième groupe, « cirrhose sévère avec ascite », comprend 5 patients avec un score Child-Pugh médian de 12 (variant entre 10 et 13). Dans notre analyse, ces patients seront désignés comme atteints de cirrhose sévère, sans référer expressément à la présence d’ascite.

En cirrhose légère, les paramètres pharmacocinétiques de la lamotrigine ne sont pas exactement comparables aux volontaires sains (ASC de 76,3 contre 66,5 mcg·hr/mL, demi-vie de 42,5 contre 31,7 h, clairance d’élimination plasmatique de 0,29 contre 0,36 mL/min/kg), mais les légères différences semblent peu significatives. En cirrhose modérée, les paramètres étaient altérés avec une exposition (120 contre 66,5 mcg·hr/mL) et un temps de demi-vie (64,5 contre 31,7 h) quasiment doublés, ainsi qu’une clairance d’élimination plasmatique réduite (0,22 contre 0,36 mL/min/kg) par rapport au groupe contrôle. En cirrhose sévère, cette tendance se maintient avec une exposition (197 contre 66,5 mcg·hr/mL) et un temps de demi-vie (90,9 contre 31,7 h) significativement augmentés, quasiment triplés et une clairance d’élimination plasmatique (0,13 contre 0,36 mL/min/kg) réduite environ du tiers comparativement aux volontaires sains. Les auteurs mentionnent que le médicament a été bien toléré dans l’ensemble des groupes. Les effets indésirables rapportés (maux de tête, épigastralgie, douleur abdominale, diarrhée) étaient légers et résolus dans un délai de 2 jours, sans être plus fréquents chez les cirrhotiques. Les auteurs n’ont pas rapporté d’effets indésirables cutanés. À noter que la dose de 100 mg utilisée dans l’étude est une dose de départ élevée. Ceci a pu contribuer à ce phénomène. Les auteurs n’ont également pas spécifié si certains patients de l’étude recevaient des inducteurs ou inhibiteurs de la glucuronidation, connus pour altérer les paramètres pharmacocinétiques de la lamotrigine. À noter que dans cette étude, une seule dose était administrée. Ceci limite l’interprétation et l’extrapolation des résultats dans une contexte de prise chronique étant donné le phénomène d’auto-induction associé à la lamotrigine.

À travers les données retrouvées dans la littérature, l’usage de la lamotrigine en cirrhose légère sans ajustement de dose semble rassurant. En cirrhose modérée, au vu des changements pharmacocinétiques, l’initiation doit se faire avec précaution en s’assurant d’une réduction des doses initiales et d’escalade d’environ 50 % par rapport aux doses usuelles, afin de réduire le risque d’effets indésirables. Les doses de maintien devraient aussi être réduites de 50 %, mais pourraient être augmentées selon la réponse clinique et la tolérance, tout en préconisant des intervalles d’ajustement posologiques plus longs afin d'assurer une titration plus lente. En cirrhose sévère, nous suggérons un usage très prudent de la lamotrigine avec une réduction des doses initiales, de titration et de maintien d’environ 75 %, basé sur la pharmacocinétique altérée du médicament montrée dans l’étude de Marcellin et collaborateurs. Les doses de maintien pourraient aussi être augmentées au-delà de ce seuil, si la condition clinique le justifie et qu’un suivi de la tolérance est effectué. En cirrhose sévère, en présence d’un inhibiteur de la glucuronidation qui augmente déjà les concentrations de lamotrigine, nous ne suggérons pas l’usage de la lamotrigine.

Lévétiracétam

Absorption

Monographie
Comprimés à libération régulière :
F : 100 %
Tmax (h) : 1,3

Dose unique de 1000 mg per os (Brockmöller 2005)
Tmax (h) : 0,8 ± 0,3
Cmax (mcg/mL) : 23,1 ± 1,2
ASC (mcg·hr/mL) : 234 ± 49

Insuffisance hépatique

Dose unique de 1000 mg per os (Brockmöller 2005)

Child A :
Tmax (h) : 0,6 ± 0,2
Cmax (mcg/mL) : 23,6 ± 4,9
ASC (mcg·hr/mL) : 224 ± 25

Child B :
Tmax (h) : 0,5 ± 0,0
Cmax (mcg/mL) : 24,7 ± 3,3
ASC (mcg·hr/mL) : 262 ± 58

Child C :
Tmax (h) : 1,6 ± 1,5
Cmax (mcg/mL) : 24,1 ± 3,8
ASC (mcg·hr/mL) : 595 ± 220

Distribution

Monographie
Liaison protéique : < 10 %
VD (L/kg) : 0,5 à 0,7

Dose unique de 1000 mg per os (Brockmöller 2005)
VZ/f (L) : 47,3 ± 3,1

Insuffisance hépatique

Dose unique de 1000 mg per os (Brockmöller 2005)
Child A : VZ/f (L) : 49,1 ± 4,6
Child B : VZ/f (L) : 48,6 ± 4,3
Child C : VZ/f (L) : 44,6 ± 3,7

Métabolisme

Monographie
Métabolisme non hépatique
Voies métaboliques : hydrolyse enzymatique par les sérine-estérases dans le sang et les tissus en un métabolite inactif (L057), à environ 24 % de la dose. Présence de 2 autres métabolites mineurs (environ 3 % de la dose).

Métabolites actifs : non

Insuffisance hépatique

Absence de données

Élimination

Monographie
t1/2 (h) : 7 ± 1
CLtot (mL/min/kg) : 0,96
CLrénale (mL/min/kg) : 0,6

Élimination rénale (66 % sous forme inchangée, 24 % sous forme du métabolite inactif L057 et environ 3 % sous forme de 2 autres métabolites mineurs inactifs). L’excrétion a lieu par filtration glomérulaire suivie d’une réabsorption tubulaire partielle (ainsi qu’une sécrétion tubulaire active pour le métabolite L057).

Dose unique de 1000 mg per os (Brockmöller 2005)
t1/2 (h) : 7,6 ± 1,0
CL/f (mL/min/1,73 m2) : 63,4 ± 9,7
CLrénale (mL/min/1,73 m2) : 44,1 ± 10,7
CLnon-rénale (mL/min/1,73 m2) : 19,3 ± 1,8

Insuffisance hépatique

Dose unique de 1000 mg per os (Brockmöller 2005)
Child A
t1/2 (h) : 7,6 ± 0,7
CL/f (mL/min/1,73 m2) : 62,5 ± 8,7
CLrénale (mL/min/1,73 m2) : 42,4 ± 9,2
CLnon-rénale (mL/min/1,73 m2) : 20,1 ± 4,7

Child B
t1/2 (h) : 8,7 ± 1,5
CL/f (mL/min/1,73 m2) : 55,4 ± 10,5
CLrénale (mL/min/1,73 m2) : 34,2 ± 8,3
CLnon-rénale (mL/min/1,73 m2) : 21,2 ± 5,0

Child C
t1/2 (h) : 18,4 ± 7,2
CL/f (mL/min/1,73 m2) : 29,2 ± 13,5
CLrénale (mL/min/1,73 m2) : 16,8 ± 11,1
CLnon-rénale (mL/min/1,73 m2) : 12,4 ± 2,5

Recommandations de la monographie
Aucun ajustement posologique ne s'impose en présence d'une atteinte hépatique légère ou modérée. Chez les patients présentant une atteinte hépatique sévère, la clairance de la créatinine peut donner lieu à une sous-estimation de l'atteinte rénale. Par conséquent, on recommande une réduction de 50 % de la dose d'entretien quotidienne lorsque la clairance de la créatinine est < 60 mL/min/1,73 m2.

Dans la littérature, une seule étude menée par Brockmöller et collaborateurs en 2005 a évalué les paramètres pharmacocinétiques du lévétiracétam chez des sujets cirrhotiques suite à l’administration d’une dose unique de 1000 mg per os. L’étude incluait 16 patients cirrhotique (5 Child-Pugh A, 6 Child-Pugh B et 5 Child-Pugh C) comparés à un groupe témoin de 5 sujets sains, pour une population totale de 21 patients. Les paramètres pharmacocinétiques des patients atteints de cirrhose légère et modérée (Child-Pugh A et B) étaient comparables à ceux des sujets sains. Chez les patients atteints de cirrhose sévère (Child-Pugh C), l’exposition était augmentée (ASC de 595 contre 234 mcg·hr/mL) et le temps de demi-vie allongé (18,4 contre 7,6 h) en raison d’une clairance d’élimination totale du médicament réduite (29,2 contre 62,5 mL/min/1,73 m2). Les auteurs ont cependant relevé que la moyenne de clairance à la créatinine du groupe atteint de cirrhose sévère était plus basse que celle des sujets sains (63 contre 93 mL/min/1,73 m2). La clairance rénale des 2 autres groupes à l’étude (Child-Pugh A et B) étaient respectivement de (121 et 100 mL/min/1,73 m2), soit comparable au groupe contrôle. La tolérance du médicament chez les différents groupes de patients n’a pas été mentionnée dans l’étude. (Brockmöller 2005)

Une récente étude de modélisation pharmacocinétique menée par Shen et collaborateurs en 2023 s’est intéressée à la cinétique du lévétiracétam chez diverses populations, incluant des patients cirrhotiques. Un modèle mathématique a été entraîné à l’aide des données physicochimiques de la molécule, des données pharmacocinétiques issues d’autres études cliniques sur le médicament et de données sur les caractéristiques physiologiques de divers groupes de populations. Les auteurs ont donc simulé l’administration d’une dose unique de 1000 mg per os chez des patients sains ainsi que chez des patients cirrhotiques de degré léger à avancé. Les résultats obtenus étaient les suivants : ASC prédite de 248,86 mcg·hr/mL chez les sujets sains et ASC prédites de (254,51; 297,47; 452,45 mcg·hr/mL) chez les cirrhotiques de Child-Pugh classe A à C respectivement. En comparant à la cohorte de Brockmöller décrite précédemment (ASC de 234 mcg·hr/mL pour les sujets sains et 224, 262, 595 mcg·hr/mL pour les cirrhotiques de Child-Pugh A à C respectivement), on constate que l’exposition au médicament est relativement comparable entre les groupes appariés des deux études, sauf en Child-Pugh C où l’exposition est moins élevée dans le groupe de l’étude de modélisation, en restant tout de même augmentée par rapport au groupe sain. Les auteurs de l’étude de modélisation mentionnent que leurs résultats sont également marqués par une clairance à la créatinine des patients Child-Pugh C réduite de 50 % par rapport au groupe contrôle. Ce serait donc la surestimation de la fonction rénale chez les patients atteints de cirrhose sévère qui pourrait être responsable de cette différence d’exposition. (Shen, 2023).

Une dernière petite étude de type « série de cas » a rapporté l’utilisation du lévétiracétam chez 3 patients cirrhotiques pendant environ 2 ans à des doses de 4000 mg/jour pour 2 patients et 3000 mg/jour pour 1 patient. Plusieurs informations manquent dans l’étude (stade de cirrhose des patients, fonction rénale), mais on y apprend qu’au bout du suivi à 2 ans, la fonction hépatique des 3 patients ne s’est pas détériorée, que la molécule semble avoir été bien tolérée (non retirés de l’étude pour effets indésirables) et que leurs dosages plasmatiques de lévétiracétam étaient dans les normales attendues; entre 12 et 46 mg/L. (Bilo 2008) (Patsalos 2008)

À travers les données retrouvées dans la littérature et la pharmacocinétique du médicament, l’usage du lévétiracétam chez les patients atteints de cirrhose légère et modérée semble sécuritaire et ne nécessite pas d’ajustement de dose. Pour les patients atteints de cirrhose sévère, les données dans la littérature montrent une clairance réduite du médicament et une ASC plus que doublée comparativement aux sujets sains. Cependant, les auteurs justifient ce résultat par une diminution de la clairance rénale chez ces patients. De plus, le profil pharmacocinétique du médicament est rassurant vu l’absence d’un métabolisme hépatique et une élimination uniquement par voie rénale. Ainsi, nous suggérons l’usage de la molécule aux doses usuelles chez ces patients en faisant preuve de prudence et en assurant une évaluation adéquate de leur fonction rénale. Il est à noter que la fonction rénale peut-être surestimée chez les patients cirrhotiques en raison d’une production hépatique réduite de créatine ou encore de la perte de masse musculaire secondaire à la dénutrition. (Francoz 2010)

Phénytoïne

Absorption

Monographie
Comprimés à libération (prolongée/régulière) :
F : Absorption lente et variable. Dépendante de la forme (acide ou sel) ainsi que de la formulation pharmaceutique.
Tmax (h) : 4 à 12 pour les capsules (formulation longue action), 1,5 à 3 pour les formulations à libération immédiate (comprimés croquables et suspension)

Insuffisance hépatique

Absence de données

Distribution

Lexicomp
Liaison protéique : 87,8 à 91,9 % (Albumine)
VD (L/kg) : 0,52 à 0,78

Insuffisance hépatique

Absence de données

Métabolisme

Monographie, Asconapé 2014
Métabolisme hépatique
Voies métaboliques : Para-hydroxylation et formation de métabolites inactifs (métabolite majeur 5-(4-hydroxyphenyl)-5-phenylhydantoïne ou p-HPPH) par les isoenzymes hépatiques suivantes : CYP2C9 (voie majeure à 90 %) et CYP2C19 (voie mineure à 10 %).

Pharmacocinétique non linéaire (modèle de Michaelis-Menten) et dose dépendante. Le système d’enzyme (CYP2C9 et CYP2C19) est saturable au-delà d’une certaine dose (même dans l’intervalle thérapeutique normal). Le métabolisme passe d’une cinétique d’ordre 1 à une cinétique d’ordre zéro, où une faible augmentation de dose peut changer de manière importante les concentrations plasmatiques et la demi-vie.
Métabolisme aussi sujet à une grande variabilité interindividuelle (polymorphisme génétique, âge, ethnie)

Métabolites actifs : non

Insuffisance hépatique

Absence de données

Élimination

Monographie, Asconapé 2014 t1/2 (h) : 22 (varie de 7 à 42 chez l’adulte) pour les capsules et la suspension ; 14 (varie de 7 à 29) pour les comprimés croquables.

Excrétion biliaire sous forme de métabolites inactifs, réabsorbés puis éliminés dans l’urine. Élimination rénale (< 5 % sous forme inchangée, 60 à 80 % sous forme du métabolite principal p-HPPH, glucurono-conjugué et d’autres métabolites conjugués)

Insuffisance hépatique

Absence de données

Recommandations de la monographie
Chez les patients souffrant de maladie rénale ou hépatique, ou en présence d’hypoalbuminémie, on observe une élévation de la concentration plasmatique de phénytoïne libre. Les concentrations de phénytoïne libre peuvent être plus utiles dans cette population de patients. Ce phénomène doit être pris en considération durant la surveillance thérapeutique et après les mesures de la concentration plasmatique de la phénytoïne, lesquelles pourraient être requises pour établir la posologie optimale.

Aucune étude clinique retrouvée dans la littérature n’a étudié l’emploi de la phénytoïne en insuffisance hépatique.

Une étude réalisée par Affrime et collaborateurs en 1975 a évalué le pourcentage de fraction libre de la diphénylhydantoïne chez 8 patients atteints de maladie hépatique alcoolique (dont certains avec confirmation de cirrhose à la biopsie), comparativement à 9 volontaires sains. La moyenne de la fraction libre de diphénylhydantoïne chez les patients cirrhotiques était de 11,7 %, comparativement à une moyenne de 8,3 % chez les volontaires sains. Les auteurs en ont conclu que la liaison protéique de la diphénylhydantoïne n’était pas significativement altérée en cirrhose. Pour chacun des patients, l’étude fournit la valeur d’albumine plasmatique, mais ne donne pas d’indication sur le stade de sévérité de la maladie hépatique. (Affrime 1975)

Une autre étude réalisée par Kutt et collaborateurs en 1964 a évalué les concentrations plasmatiques de phénytoïne et l’excrétion urinaire du métabolite majeur de la molécule (p-HPPH) chez 15 patients avec une maladie hépatique (13 cirrhotiques) ayant reçus une dose de 4 mg/kg/jour de diphénylhydantoïne pendant 2 semaines. L’étude rapporte que 10 des 13 patients atteints de cirrhose n’ont présenté aucun signe d’intoxication, aucune accumulation plasmatique de la diphénylhydantoïne et une excrétion urinaire du métabolite majeur (p-HPPH) dans les normales attendues (environ 60 à 70 % de la dose quotidienne). Trois patients atteints de cirrhose ont présenté des signes d’intoxication à la phénytoïne (ataxie et nystagmus). Cependant, l’un de ces 3 patients recevait aussi du phénobarbital à une dose de 1-2 mg/kg/jour, qui serait plutôt la cause de ces symptômes d’intolérance, selon ce qui est rapporté par les auteurs. Donc, seulement 2 patients de l’étude ont présenté une accumulation plasmatique de diphénylhydantoïne et une réduction de l’excrétion urinaire du métabolite principal (p-HPPH) aux doses usuelles de 3 à 5 mg/kg/jour. Les auteurs fournissent des tests de fonction hépatique pour les patients à l’étude, mais sans qualifier le degré de leur maladie. (Kutt 1964)

Un rapport de cas publié en 2012 par Ambrose et collaborateurs décrit une patiente de 50 ans, atteinte de cirrhose alcoolique qui prenait de la phénytoïne 300 mg per os die pour des crises convulsives secondaires à une hémorragie sous-arachnoïdienne traumatique. Elle a été admise pour une chute avec traumatisme crânien et son évaluation neurologique a révélé un nystagmus, des tremblements et de l’ataxie. Sa concentration plasmatique de phénytoïne était de 30,9 mg/L (122,5 mcmol/L), corrigée à 46,8 mg/L (185,5 mcmol/L) avec l’équation de Sheiner-Tozer, en raison d’une hypoalbuminémie à 28 g/L. La phénytoïne a été cessée, puis reprise à dose réduite de 225 mg die lorsque la concentration plasmatique était inférieure à 18 mg/L (71,5 mcmol/L). La patiente a eu son congé au jour 14 de son séjour, lorsque ses symptômes étaient améliorés. Les auteurs ne mentionnent pas le score Child-Pugh de la patiente.

Plusieurs éléments spécifiques de la maladie hépatique peuvent altérer le comportement d’une molécule présentant une pharmacocinétique non linéaire et une grande variabilité interindividuelle. D’une part, l’activité du CYP2C9 serait davantage réduite en cirrhose sévère, tandis que celle du CYP2C19 serait significativement diminuée à tous les stades de l’insuffisance hépatique. (Anderson 2014) Ainsi, le métabolisme de la molécule pourrait être réduit chez certains patients, qui pourraient atteindre le seuil de non linéarité et accumuler exponentiellement la phénytoïne à des doses plus faibles que prévu, comme observé dans l’étude de Kutt et collaborateurs. D’autre part, certains facteurs, comme un défaut de synthèse hépatique ou la dénutrition, entraînent une baisse du taux d’albumine plasmatique en cirrhose. (Bochatay 2015) Cela provoque une augmentation de la fraction libre (donc active et toxique) du médicament. (Asconapé 2014) Ainsi, la mesure de la concentration plasmatique totale devient moins fiable, car pour une même concentration totale, l’effet pharmacologique risque d’être plus important en raison de cette augmentation. Ce phénomène est bien décrit et la formule de Sheiner-Tozer permet de corriger la valeur mesurée en fonction du taux d’albumine. (Hong 2009) Cependant, l’utilisation de cette formule est remise en question en raison de son manque de précision et de la contribution d’autres facteurs à l’augmentation de la fraction libre, tels que l’hyperbilirubinémie ou encore l’urémie. (Asconapé 2014) (Hong 2009) (Kiang 2016) Une meilleure alternative à cette formule est la mesure directe de la fraction libre de phénytoïne en laboratoire, afin de s’assurer que la concentration se situe dans l’intervalle thérapeutique visé (malheureusement, ce test n’est pas disponible dans tous les centres hospitaliers). (Asconapé 2014).

En résumé, il existe un manque de données dans la littérature pour évaluer la sécurité de l’usage de la phénytoïne chez les patients cirrhotiques et pour proposer des ajustements posologiques précis. Tel que discuté précédemment, plusieurs facteurs exposent ces patients à un risque accru de concentrations plasmatiques supra-thérapeutiques et donc d’intoxication. Toutefois, la phénytoïne présente l'avantage d'être une molécule permettant un suivi thérapeutique pharmacologique, avec un intervalle thérapeutique bien défini. Ainsi, le traitement pourrait être initié prudemment à dose réduite, en surveillant les concentrations plasmatiques libres (si possible) une fois l'équilibre atteint et après chaque ajustement posologique en faisant preuve d’une grande prudence. Au vu de la pharmacocinétique, on peut raisonnablement s'attendre à une exposition accrue au médicament, par une baisse de la clairance plasmatique et une augmentation du temps de demi-vie d’élimination; ce qui suggère aussi une titration plus lente. Dans les situations où l'accès au dosage des concentrations plasmatiques libres est limité (coût, délais), une approche pratique pourrait consister à réaliser une mesure simultanée des concentrations libre et totale afin d'établir un rapport personnalisé pour son patient. Par la suite, les dosages de la concentration plasmatique totale pourront être utilisés pour estimer la concentration libre en se basant sur ce rapport, tant que l’état global du patient demeure stable (sans quoi ce ratio pourrait changer). Enfin, un suivi de l’innocuité est essentiel pour détecter précocement les signes d'intoxication. Un clinicien désirant initier de la phénytoïne chez un patient atteint d’insuffisance hépatique devrait évaluer le ratio risque/bénéfice convenablement et assurer un suivi serré.

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