médicament | Child A | Child B | Child C |
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Bromocriptine | Utiliser avec précaution | Utiliser avec précaution | Absence de données |
Cabergoline | Sécuritaire | Utiliser avec précaution | Utiliser avec précaution |
Pramipexole | Sécuritaire | Sécuritaire | Sécuritaire |
Ropinirole | Absence de données | Absence de données | Absence de données |
Rotigotine | Sécuritaire | Sécuritaire | Absence de données |
Maladie de Parkinson et cirrhose
Des symptômes extrapyramidaux tels que l’hypokinésie, la dystonie et la rigidité sont parfois présents chez les patients cirrhotiques souffrant d’encéphalopathie hépatique. Selon certaines références, ces symptômes se nomment cirrhosis-related Parkinsonism, en raison de leurs ressemblances. Toutefois, ces complications de l’encéphalopathie hépatique sont généralement réversibles, contrairement à celles qui se développent dans le cours de la maladie de Parkinson. La présence de ces symptômes serait notamment reliée à la dégénérescence hépato-cérébrale chronique acquise et le traitement recommandé est la transplantation hépatique. (Butterworth 2012)(Burkhard 2003)(Apetauerova 2020) Cette dégénérescence serait associée à l’accumulation de manganèse. (Burkhard 2003)(Mehkari 2020)
Syndrome des jambes sans repos
La prévalence du syndrôme des jambes sans repos (SJSR) est plus élevée chez les patients atteints de cirrhose comparativement au reste de la population. Il n’existe toutefois pas de lien entre la sévérité des symptômes et le degré de la cirrhose. (Naqvi 2021) La présence du SJSR serait exacerbée par une déficience en fer, des niveaux de ferritine élevés et des niveaux de folates diminués. Ces facteurs sont souvent retrouvés chez les patients cirrhotiques. (Franco 2008) (Moretti 2018)
Effets indésirables des agonistes dopaminergiques
Les agonistes dopaminergiques sont reconnus pour causer certains effets indésirables tels que de la confusion, de l’agitation et de la désorientation. Ces symptômes peuvent également être présents chez les cirrhotiques pendant un épisode aigu d’encéphalopathie hépatique. Certains facteurs de risque identifiés sont la dose du médicament, la durée du traitement, des antécédents de désordres psychiatriques, les patients de sexe masculin ainsi qu’un jeune âge. (Cardon-Dunbar 2017)(Grall-Bronnec 2018) Il est important de garder en tête que ces agents peuvent déclencher ces symptômes, particulièrement lors d’un contexte d’usage à long terme.
Un autre effet indésirable à surveiller chez les patients cirrhotiques avec la prise des agonistes dopaminergiques est l’impulsivité. Les patients qui en souffrent peuvent manifester une libido augmentée, participer à des jeux de paris compulsifs, faire des achats excessifs, développer un trouble alimentaire, etc. Cet effet se présente rapidement suite à l’initiation de la thérapie et se dissipe habituellement suite au retrait du médicament. À noter que cet effet est plus probable avec la prise du pramipexole comparativement aux autres agonistes dopaminergiques. Un arrêt du pramipexole et un essai de ropinirole ou de rotigotine est possible. (Kolla 2010) Il faut également surveiller l’apparition d’hypotension orthostatique. Le développement de ce désordre pourrait être néfaste chez les patients cirrhotiques présentant une dysfonction circulatoire. (Vora 2019)
Absorption | Comprimés de 2,5 mg à libération (régulière) :
Dose unique de 5 mg (2 comprimés de 2,5 mg) per os (Nelson 1990) :
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Distribution |
Liaison protéique : 90 à 96 %
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique
Métabolites actifs : oui Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Dose unique de 5 mg per os (Nelson 1990)
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Recommandations de la monographie |
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L’innocuité et l’efficacité de la bromocriptine n’ont pas été établies chez les patients atteints d’une maladie hépatique grave. |
Aucune étude portant sur la pharmacocinétique de la bromocriptine en présence d’insuffisance hépatique n’a été identifiée.
Dans l’étude de Sahney et collaborateurs, l’utilisation de la bromocriptine a été évaluée pour le soulagement des symptômes de Parkisonisme hépatique. Au total, 1016 patients atteints de cirrhoses ont été évalués et 50 d’entre eux (4,9 %) avaient des symptômes de Parkinson associé à la cirrhose. Quarante-six patients ont été ensuite répartis aléatoirement pour recevoir un placébo (N = 22) ou de la bromocriptine (N =26). La dose de bromocriptine était de 2,5 mg per os une fois par jour pendant 3 jours puis 2,5 mg per os deux fois par jour pour 3 jours puis 2,5 mg per os trois fois par jour. Par la suite, la dose pouvait être majorée de 2,5 mg par semaine jusqu’à l’atteinte de 15 mg total par jour à la fin de la quatrième semaine. Dans les patients qui ont participé à l’étude, l’âge moyen était de 54 ans (similaire dans les deux groupes) et 87,7 % étaient des hommes. Les étiologies des cirrhoses (29 % secondaire à l’alcool, 37,5 % secondaire à une cirrhose NASH, 29 % cryptogénique dans le groupe recevant de la bromocriptine), la sévérité de la maladie hépatique (score Child-Pugh de 7,6 ± 1,3 et score MELD de 18,2 ± 4,2 dans le groupe recevant de la bromocriptine) et la présence de shunts porto-systémiques étaient similaires dans les deux groupes.
Une amélioration du score moteur UPDRS à la semaine 12 a été utilisée pour évaluer la réponse clinique du médicament. Dans le groupe bromocriptine, 7 patients ont eu une réponse complète comparativement à aucun patient dans le groupe placébo. Une réponse partielle a été observée chez 12 patients dans le groupe bromocriptine comparativement à 1 dans le groupe placébo. Il y a eu une amélioration significative des symptômes de rigidité, de tremblement, de bradykinésie et dans la démarches des patients qui ont reçu la bromocriptine (en comparaison au placébo).
Aucun effet indésirable majeur n’a été identifié dans les deux groupes. Aucun patient n’a eu besoin que la dose de bromocriptine ou de placébo soit réduite. Dans les effets indésirables rapportés, il y a eu 5 cas de nausées (comparativement à 3), 2 cas de vomissements (comparativement à 2), 3 cas d’hypotension posturale (comparativement à 1), 1 cas de somnolence (comparativement à 1) et 2 cas de crampes au niveau des jambes (comparativement à 1) dans le groupe recevant de la bromocriptine (comparativement au groupe placébo). Ceci semblait similaire dans les deux groupes.
L’utilisation de bromocriptine semble rassurante en tenant compte de l’étude de Sahney et collaborateurs. L’utilisation d’une dose jusqu’à 15 mg par jour chez des patients atteints d’une cirrhose légère à modérée (Child A et Child B) semble avoir été bien tolérée. Vu le métabolisme hépatique extensif, il est préférable de débuter à faible dose et de titrer lentement. Aucune donnée n’a été identifiée en présence d’une cirrhose sévère (Child C).
Absorption |
Monographie, Del Dotto 2003
Insuffisance hépatique
Monographie
Child C
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Distribution | Liaison protéique : 41 à 42 % Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique extensif
Métabolites actifs : non Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
t1/2 (h) : 63 à 68 chez les volontaires en bonne santé et 79 à 115 heures chez les patients hyperprolactinémiques
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Recommandations de la monographie |
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La cabergoline étant largement métabolisée par le foie, il convient d’être prudent et de surveiller étroitement les patients présentant une atteinte hépatique auxquels on administre la cabergoline. |
Dans la monographie de la cabergoline, il est mentionné que l’effet de l’insuffisance hépatique sur les paramètres pharmacocinétiques a été étudié chez 12 patients. Une dose de 1 mg a été administrée à des patients cirrhotiques, leur score Child-Pugh variait de 5 à 11 (le nombre de patients dans chaque catégorie n’est pas mentionné). Chez les patients avec un score Child-Pugh entre 5 et 9, il n’y avait pas de différence significative dans les paramètres étudiés. Chez les patients atteints d’une cirrhose sévère (Child-Pugh de 10 et plus), la Cmax était multipliée par près de 2 et l’ASC par environ 6. Il n’y avait pas d’information sur les autres caractéristiques des patients. Les autres données pharmacocinétiques (notamment la demi-vie) n’étaient pas disponibles.
Peu de données sont disponibles concernant l’utilisation de cabergoline en présence d’insuffisance hépatique. Aucune donnée concernant la tolérance de la cabergoline chez cette population n’a été identifiée. Les paramètres pharmacocinétiques ne semblent pas affectés en présence d’une insuffisance hépatique légère à modérée. Toutefois, les données brutes n’étant pas accessibles, vu la faible taille d’échantillon étudiée, considérant le fort métabolisme hépatique et constatant les fortes altérations observées en insuffisance hépatique sévère, il nous est impossible d’affirmer avec conviction que la cirrhose modérée n’aura aucun impact sur l’exposition à la cabergoline. Une recommandation d’usage avec précaution nous apparaît donc plus justifiée dans ce contexte. En présence de cirrhose sévère, l’exposition à la cabergoline semble fortement augmentée. Il est donc recommandable de considérer une molécule alternative dans cette situation. Si un patient atteint d’une cirrhose Child C nécessite de la carbergoline, il serait raisonnable d’employer une très faible dose, considérant l’altération marquée des paramètres pharmacocinétiques.
Absorption |
Comprimés réguliers :
Dose unique de 0,25 mg per os (Putri 2016)
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Distribution |
Liaison protéique :15 %
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique non significatif
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Dose unique de 0,25 mg per os (Putri 2016)
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Recommandations de la monographie |
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Les effets possibles de l’insuffisance hépatique sur la pharmacocinétique du pramipexole n’ont pas été évalués, mais ils devraient être minimes. Environ 90 % de la dose radiomarquée au C 14 étant retrouvés dans l’urine sous forme de médicament inchangé, l’insuffisance hépatique ne devrait pas avoir d’effet marqué sur l’élimination du pramipexole. |
Aucune étude portant sur la pharmacocinétique du pramipexole en présence d’insuffisance hépatique n’a été identifiée.
Dans l’étude de Moretti et collaborateurs, l'utilisation du pramipexole dans le traitement du syndrôme des jambes sans repos (SJSR) a été étudiée chez 211 patients cirrhotiques. Les patients étaient distribués également entre hommes et femmes, l’âge moyen était de 59 ans, l’étiologie principale de la cirrhose était l’alcool (66 %), 22 % des patients présentaient un carcinome hépatocellulaire et les degrés de cirrhose étaient divisés comme suit : 132 Child A (62 %), 54 Child B (26 %) et 25 Child C (12 %). Tous les patients dans cette étude débutaient un traitement pour le SJSR pour la première fois. Le traitement était le pramipexole pour tous.
La dose initiale était de 0,18 mg (0,25 mg en pramipexole dihydrochloride (PDHC), formulation couramment employée pratique) per os une fois par jour au coucher et elle était titrée jusqu’à une dose de 0,88 mg (1,25 mg de PDHC) per os une fois par jour au coucher sur 15 semaines. Au 135e jour de l’étude (dose de 0,88 mg per os une fois par jour), 41 patients (19 %) ont cessé le traitement suite au développement d’effets indésirables (nausées persistantes, hallucinations visuelles et illusions d’optique). Pour les 170 (81 %) patients restants, la dose de pramipexole était augmentée à 1,4 mg (2 mg de PDHC) per os un fois par jour au coucher.
Après 30 jours de traitement additionnel, 134 des 170 patients restants se disaient soulagés et confortables avec cette dose. Les 36 autres patients auraient rapporté une aggravation de leurs symptômes initiaux, ce qui serait compatible avec le phénomène d’augmentation, selon les auteurs. Leur dose de pramipexole était alors diminuée à 0,88 mg (1,25 mg de PDHC) per os une fois par jour. Après un 40 jours additionnel, 110 patients étaient toujours soulagés à la dose de 1,4 mg (2 mg de PDHC) par jour, alors que 60 patients rapportaient toujours une aggravation de leurs symptômes. Chez ces derniers, la dose était diminuée à 0,7 mg (1 mg de PDHC).
Pour les 170 patients ayant complété les 205 jours de l’étude, une amélioration des symptômes de dépression, de la qualité du sommeil et des symptômes de somnolence diurne était rapportée. Les auteurs ne mentionnent toutefois pas si les arrêts de traitement étaient plus fréquents en présence d’un stade plus avancé de cirrhose. (Moretti 2018)
Bien que nous n'ayons pas identifié d’études pharmacocinétiques détaillant l’effet de la cirrhose sur le pramipexole, en raison de son faible métabolisme hépatique, il ne semble pas nécessaire d’ajuster la dose. L’utilisation du pramipexole chez la population cirrhotique semble rassurante lorsque l’on prend en compte l’étude de Moretti et collaborateurs. Il faut toutefois être vigilant avec la survenue d’effets indésirables possibles, en raison de la fragilité de la population cirrhotique.
Absorption |
Monographie
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Distribution |
Liaison protéique : 40 %
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique extensif
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Monographie
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Recommandations de la monographie |
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Le ropinirole n’ayant pas été étudié chez des patients présentant une atteinte hépatique, son administration n’est pas recommandée. |
Aucune donnée pharmacocinétique ou pharmacodynamique du ropinirole chez la population cirrhotique n’a été identifiée. Étant donné que cette molécule a un métabolisme hépatique extensif et une faible biodisponibilité, une augmentation de l’exposition et un risque d’accumulation serait attendu en présence d’insuffisance hépatique. Pour ces raisons, il n’est pas recommandé d’utiliser ce médicament chez les patients cirrhotiques considérant que d’autres options avec plus de données sont disponibles.
Absorption |
Timbre (Monographie)
Timbre de 2 mg/24 h pendant 3 jours (Cawello 2014)
Insuffisance hépatique
Timbre de 2 mg/24 h pendant 3 jours (Cawello 2014)
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Distribution |
Liaison protéique : 90 %
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique extensif
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Monographie
Timbre de 2 mg/24 h pendant 3 jours (Cawello 2014)
Élimination rénale (71 % sous forme de métabolites inactifs, moins de 1 % inchangée)
Insuffisance hépatique
Timbre de 2 mg/24 h pendant 3 jours (Cawello 2014)
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Recommandations de la monographie |
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Il n’est pas nécessaire d’ajuster la dose en cas d’insuffisance hépatique légère ou modérée. La rotigotine n’a pas été évaluée chez des patients atteints d’insuffisance hépatique sévère. |
Dans l’étude de Cawello et collaborateurs, les paramètres pharmacocinétiques de la rotigotine ont été évalués chez 8 patients sains et 8 patients atteints d’une cirrhose de stade Child B. L’application quotidienne d’un timbre de 2 mg par 24 heures pendant une durée de trois jours était étudiée. Dans le groupe de sujets sains, le Tmax était de 17 heures avec une Cmax de 0,453 ng/mL et une ASC0-24 de 7,81 ng·hr/mL. Chez les patients cirrhotiques, le Tmax était de 10 heures. La Cmax était de 0,426 ng/mL et l’ASC0-24 était de 7,05 ng·hr/mL, ce qui était comparable aux valeurs des sujets sains. La demi-vie dans les deux groupes était comparable (5,56 heures en présence de cirrhose comparativement à 6,73 heures chez les sujets sains). (Cawello 2014)
Dans cette étude, l’effet indésirable le plus fréquemment rapporté était une réaction cutanée au niveau du site d’application du timbre (est apparu chez 4 patients du groupe sain et 2 patients du groupe atteint de cirrhose). Un cas de fatigue a été rapporté dans le groupe de patients cirrhotiques. (Cawello 2014)
Les auteurs concluent que les paramètres pharmacocinétiques de la rotigotine n’étaient pas influencés par un insuffisance hépatique modérée (Child B).
L’utilisation de la rotigotine semble sécuritaire chez les patients souffrant d’insuffisance hépatique légère à modérée. Aucune donnée n’a été identifiée sur son utilisation en présence d’insuffisance hépatique sévère.